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L’avis des libraires - 262ème chronique : La captive de Dunkelstadt

L’avis des libraires - 262ème chronique

La captive de Dunkelstadt de Magali Lefebvre

Hommage romantique à la littérature gothique


Jeune homme séduisant, élève fraîchement diplômé, esprit cultivé, parti idéal issu d’une famille respectable… Le futur d’Emile Dupontel semble bien prévisible : il est destiné à devenir notaire au sein du cabinet familial et épouser dans la foulée la femme choisie par ses parents.

Mais, avant de suivre cette voie tracée d’avance, Emile s’est accordé un long détour. Après des mois passés à sillonner l’Europe, il compte clore son périple en beauté dans les contrées sauvages de la Forêt-Noire.

Très vite, le voyageur est captivé par Wolfenschlöss, un château dont la remarquable architecture égale la sinistre réputation. Les villageois alentours prétendent que la bâtisse est maudite et refusent d’évoquer les maîtresses des lieux, les von Dunkelstadt.

Lorsqu’Emile se rend sur place et rencontre l’héritière, Katarina, son sort bascule…


Des créatures étranges, des dames diaphanes, une malédiction familiale, un château inquiétant, une atmosphère oscillant entre le conte noir et la romance macabre… Aucun doute, La captive de Dunkelstadt s’inscrit bien dans le registre gothique !

Au-delà de cette évidence, l’ouvrage est avant tout une ode vibrante au genre. Une volonté pleinement revendiquée par son autrice. Car si elle ne cherche pas à en révolutionner les codes, Magali Lefebvre les maîtrise sur le bout des doigts. D’emblée, elle montre une grande érudition, témoigne son amour du gothique.

Ses sources d’inspiration s’entremêlent avec maestria : le style des architectes Georg von Dollmann et Christian Jank ; les peintures de Caspar David Friedrich ; le folklore germanique ; les écrits de Shirley Jackson, Guy de Maupassant, Théophile Gautier, Ann Radcliffe, Matthew Gregory Lewis, Bram Stocker, Sheridan Le Fanu ou des frères Grimm… On pourrait craindre une surenchère d’allusions, simples clins d’œil ou citations explicites. Pourtant, il n’en est rien. La romancière parvient à maintenir un équilibre délicat entre hommage ultra-référencé et fiction originale.

L’enthousiasme de Magali Lefebvre pour sa première publication s’avère communicatif. Aussi passe-t-on aisément sur quelques petites maladresses. A commencer par Emile, un peu trop lisse et convenu, pour convaincre… Le héros fait pâle figure face aux personnages féminins. Dans cet univers sombre, les von Dunkelstadt, tantôt féroces, tantôt fascinantes, proies ou chasseresses, surplombent le récit. Les relations entre Katarina et sa mère Wilhelmine constituent l’un des points forts du récit, de même que le sous-texte féministe entourant leur condition.

La novella se démarque également par son rythme rapide, addictif. L’intrigue trouve son souffle très rapidement, dès l’arrivée à Wolfenschlöss. Quant au texte, il brille par le soin particulier apporté à l’ambiance, les descriptions travaillées et la mythologie mise en place. Lorsqu’il s’aventure dans le domaine horrifique, l’épouvante fonctionne à merveille, rendant les péripéties d’autant plus prenantes. La monstruosité, ici, prend de nombreuses formes. La mélancolie poétique gagne peu à peu en intensité pour atteindre son apogée lors du dénouement doux-amer. L’histoire possède en outre une réflexion intéressante sur le paganisme face aux courants religieux modernes.

Pour finir, soulignons l’excellent travail d’Emilie Léger : l’artiste propose une couverture étonnante, aux couleurs vives, mais parvient à capturer une aura nébuleuse, presque irréelle – une part prépondérante de la novella.

Avant de nous en retourner aux maléfices envoûtants de Wolfenschlöss, achevons cette chronique : La captive de Dunkelstadt est une introduction accessible à la littérature gothique… Et la porte d’entrée idéale pour se glisser, à pas de loup, dans l’œuvre de Magali Lefebvre.


La captive de Dunkelstadt de Magali Lefebvre, Editions Fleur d’Absinthe, 145 pages, 12€. Dès 13 ans.


« Là, le bâtiment surplombait le bourg, et ses multiples fenêtres
lui renvoyèrent son regard, comme autant d’yeux d’une araignée
immobile sur sa toile. Une araignée aux traits séduisants. »

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