Chloé
Cinâexpress : Blanche-Neige
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đŹ de Tarsem Singh â avec Julia Roberts, Lily Collins, Armie Hammer đ Sortie : 11 avril 2012
Lâhistoire, celle de Blanche-Neige, nous la connaissons tous : les frĂšres Grimm et Perrault ont fait dâelle la princesse la plus cĂ©lĂšbre des contes de fĂ©es. En 1937, Disney renforça encore ce statut en rĂ©alisant son premier long-mĂ©trage en couleur sur cette jeune fille « aux lĂšvres rouges comme le sang et Ă la peau blanche comme la neige ». De quoi faire pĂąlir dâenvie la Belle au Bois Dormant, Raiponce ou Cendrillon ! Depuis, les contes de fĂ©es ont toujours eu la cote auprĂšs de lâempire cinĂ©matographique. Cette annĂ©e la concurrence est rude. La guerre des Blanche-Neige aura bien lieu : sur grand Ă©cran, Lily Collins et Kristen Stewart interprĂštent chacune la princesse, lâune dans un univers kitsch et magique, lâautre dans un monde de dark fantasy bien plus sombre ; sur petit Ă©cran, il faut dĂ©sormais compter sur Ginnifer Goodwin et la sĂ©rie Once upon a time. IndĂ©trĂŽnable, Blanche-Neige ? Il semblerait. Pour lâheure, Tarsem Singh et sa version féérique partent avec un lĂ©ger avantage : son Blanche-Neige sort quelques mois avant le Blanche-Neige et le Chasseur de Rupert Sanders. Premier round ! Au bout de quelques minutes, le public dĂ©couvre un gigantesque jeu de bataille navale oĂč les pions sont les courtisans et⊠Julia Roberts, du haut de son trĂŽne, qui gouverne tout ce beau monde. Il suffit Ă Roberts de lancer sa premiĂšre rĂ©plique pour que les spectateurs soient aussitĂŽt happĂ©s dans lâintrigue. Le monde dans lequel ils Ă©voluent nây est peut-ĂȘtre pas indiffĂ©rent⊠Il semblait Ă©vident que Singh serait le plus adaptĂ© pour donner un cĂŽtĂ© dĂ©calĂ© et moderne au cĂ©lĂšbre conte. Son univers visuel, ovationnĂ© avec The Cell, possĂšde cette folie fĂ©erique, impertinente mais soignĂ©e. Un univers qui sied Ă merveille aux contes de Grimm. Que ce soit au niveau des dĂ©cors, des costumes ou des couleurs, son Blanche-Neige est une rĂ©ussite. Singh mĂ©lange tous les styles avec un talent rare : un chĂąteau Ă©chappĂ© des Milles et une Nuit, une forĂȘt sombre et vaguement inquiĂ©tante propre au conte, un village bucolique de lâĂ©poque victorienne perdu sous la neige⊠Mais aussi un Bal costumĂ© grandiose ou Roberts se pavane en paon face au Prince, affublĂ© dâun haut-de-forme Ă oreilles de lapin. La vĂ©ritable innovation de Singh repose sur lâunivers du Miroir, un monde Ă©tonnamment sombre. SituĂ© au cĆur dâun lac, protĂ©gĂ© par une chaĂźne montagneuse, il est le refuge de la Reine : elle peut se confier Ă lâĂąme du Miroir, qui prend lâapparence de son reflet. Singh ne perd pas pour autant son objectif principal : celui de livrer une version drĂŽle et satyrique du conte. LâidĂ©e consiste Ă moderniser lâensemble des personnages, de prĂ©fĂ©rence avec des figures emblĂ©matiques du cinĂ©ma, comme Julia Roberts. La Reine sera donc portĂ©e sur la magie noire, obsĂ©dĂ©e par lâidĂ©e de vieillir et aura recourt Ă nâimporte quel moyen pour paraĂźtre plus jeune, quitte Ă vider les caisses de lâĂ©tat. Ce narcissisme est prĂ©texte Ă une caricature acĂ©rĂ©e des pratiques esthĂ©tiques, comme les masques ou le Bottox ! En se moquant dâelle-mĂȘme et du piĂ©destal de diva sur lequel lâon posĂ© de nombreux rĂ©alisateurs, Roberts apparaĂźt mĂ©tamorphosĂ©e : moue vaniteuse, gestuelle de prima donna, rĂ©pliques acides dĂ©bitĂ©es avec un sourire carnassier, robes dâune excentricitĂ© rare ! Un adversaire de taille pour Blanche-Neige si bien que lâon attend la confrontation avec impatience⊠HĂ©las, Lily Collins peine Ă sâimposer face Ă Roberts. MĂȘme si son personnage, Ă lâorigine est aussi insipide que candide, elle ne montre aucun charisme et pousse dâemblĂ©e le spectateur du cĂŽtĂ© de⊠La Reine ! Quâimporte, les rĂŽles secondaires, truculents Ă souhait, sont au rendez-vous : en passant par les Nains (hilarants, rĂ©orientĂ©s pour le coup en mercenaires) au majordome souffre-douleur attitrĂ© de la Reine. AprĂšs avoir prĂȘtĂ© son sourire et ses yeux bleus Ă David Fincher pour The Social Network et Ă Clint Eastwood pour J.Edgar, Armie Hammer prend un malin plaisir Ă dĂ©tourner son image de jeune premier. Il est le prince Alcott : capricieux, enfantin, prĂ©tentieux, tĂ©mĂ©raire⊠Malheureusement pour lui, il se voit tour Ă tour dĂ©pouillĂ© par les Nains, affublĂ© dâoreilles de lapin et mĂ©tamorphosĂ© en chien collant aprĂšs une potion ratĂ©e ! Câest avec une bonne dose dâautodĂ©rision quâil met sa plastique irrĂ©prochable au service de cette parodie du prince Charmant. Le comique de Blanche-Neige repose donc en grande partie sur sa prestation et celle de Julia Roberts. Comme pour accentuer la parodie du film, câest Alan Menken, lâun des compositeurs fĂ©tiches de Disney qui signe lâexcellente BO et le thĂšme principal, lâentĂȘtant « I believe in love » chantĂ©e au dĂ©nouement, dans la pure tradition Disney, par Lily Collins. Qui lâeut cru ? Au final, ce qui vient entacher la rĂ©ussite de Blanche-Neige est⊠Blanche-Neige elle-mĂȘme ! Bien quâimparfaite, cette version féérique de Tarsem Singh est un vĂ©ritable remĂšde contre la morositĂ©, Ă dĂ©couvrir en prioritĂ© pour Julie Roberts qui excelle dans son rĂŽle de marĂątre narcissique.

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