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Libère ta libraire ! #4

Libère ta libraire ! #4

Ou les tribulations d'une libraire exilée à la campagne

Bonjour à tous,

Comment allez-vous depuis la dernière fois ?

En discutant avec des amis ce week-end, la librairie est forcément venue sur le tapis. Je leur ai donc raconté les derniers clients gratinés que j'avais eus en boutique - et avec la COVID, autant dire que le nombre de chieurs ne cesse de croître d'une façon exponentielle. A croire que le virus fait ressortir les pires défauts de chacun...

Bref, en papotant, l'une d'elle m'a conseillé de balancer ces petites perles quotidiennes sur Internet. Et là, je me suis rendue compte que le dernier Libère ta libraire datait de mai 2018. Un sacré bail donc !

Alors allons-y pour ce quatrième top 10 des C VS L (Clients Versus Libraire) :

 

1) La Covid, au début, niveau info, y a eu des ratés :

C : Non mais ! Vous avez vu comment vous êtes habillée ?

L (baisse les yeux sur sa tenue) : C'est à dire ?

C : Mais enfin vous avez les jambes nues ! Vous pensez au Covid ?

L : Vous avez prévu de vous frotter contre mes mollets ?

C : Non.

L : Dans ce cas je pense que ni vous ni moi ne risquons quoi que ce soit.

 

2) Une cliente d'un certain âge experte en draguouille

C (désignant la une du journal) : Vous savez, moi j'approuve le Droit d'être importunée. Voilà qui est réfléchi, pas comme toutes les autres, Me too et je ne sais pas quoi. Elles n'iront pas se plaindre quand elles seront vieilles filles, qu'elles n'auront ni mari ni enfant. Je ne comprends pas pourquoi elles s'insurgent contre les Hommes qui draguent dans la rue.

L : Qui harcèlent. Il y a une petite différence.

C : Oh arrêtez ! Franchement, un compliment ça ne vous fait pas plaisir ?

L : ça dépend comment il est adressé.

C : Moi, je pense qu'elles mentent. Surtout que... Je ne veux pas être méchante mais vous avez vu la tête de certaines ? De mon temps, je n'étais pas vilaine et croyez-moi personne ne m'a jamais draguée comme elles le disent ! Elles s'insurgent pour rien, les femmes d'aujourd'hui.

L : Ou alors c'est vous qui avez eu beaucoup de chance.

C : Il faut dire aussi que je ne m'habillais pas comme une dévergondée. Je soignais toujours mon apparence.

L : Oui. Vous avez raison. Ces femmes sont coupables. Elles méritent ce qui leur arrive. Au bûcher !

C : Ah, vous voyez ? Nous sommes d'accord.

 

3) Une cliente extraordinairement casse-pieds

C : Si je vous commande un livre, je l'aurais quand ?

L : Il faut compter une petite semaine en moyenne. Avec la Covid, les délais sont un peu aléatoires...

C : ça n'ira pas, il me faut le Workbook 5ème pour mon fils avant mercredi.

L : Ah, si c'est pour un Workbook, on a passé la commande en début de semaine, le colis devrait bientôt arriver.

C : Non merci, je vais aller ailleurs en espérant qu'ils aient prévu davantage de stock que vous.

Elle s'en va sans adresser un au revoir.

1 semaine plus tard, retour de la cliente

C : Je viens récupérer le Workbook.

L : Mais vous n'aviez pas réservé...

C : Non mais vous m'avez dit que vous en auriez.

L : Et vous m'avez dit que vous alliez le récupérer ailleurs.

C : Je n'en ai pas trouvé.

L : L'ennui c'est qu'il ne m'en reste plus de ce niveau... Tout est parti.

C : Comment ??

L : Beaucoup de parents retardataires sont passés et les autres avaient déjà réservé leur exemplaire. Du coup, je regrette mais je n'ai plus rien à vous vendre.

C : Mais j'en vois là !

L : Oui. Ils sont réservés.

C : On pourrait s'arranger. Je vous le paye plus cher, si vous voulez...

L : La corruption de libraire, ça marche rarement vous savez. Encore moins sur un cahier d'anglais à sept euros.

C (part en claquant la porte qui, étant munie d'un groom, refuse de claquer malgré la tentative) : Vous n'êtes vraiment qu'une incompétente !

 

4) Un client têtu

C : Je voudrais vous commander ce livre s'il vous plaît.

L (après vérification) : Je suis désolée, il n'est plus édité.

C : Comment ça ?

L : Il n'est plus édité... Ils ont arrêté de l'imprimer.

C : Et pourquoi ?

L : Oh il peut y avoir un tas de raison. Ventes décevantes, changement d'éditeur...

C : Donc je ne peux pas l'avoir ?

L : Regardez, c'est écrit juste ici : Arrêt définitif de commercialisation.

C : Et si je vous le commande ?

L : ça ne changera rien vu qu'il n'est plus édité.

C : Donc je ne peux pas l'avoir ?

L : Non.

C : Et si je vous le paye d'avance ?

L : NON !!

C : Pas la peine d'être agressive. D'ailleurs je comprends jamais ce que vous me dîtes.

L : Mais vous avez vu l'écran, non ? Vous avez lu ?

C : Non. Je vois rien sur votre engin. Du coup pour le livre...

L : C'est NON !

C : Vous ne m'aimez pas trop, j'ai l'impression...

L : Oh, vous croyez ?

 

5) Une cliente qui porte sa fille aux nues

(un peu trop)

C : Je ne comprends pas pourquoi l'école ne prend pas les enfants en charge selon leur maturité et uniquement sur le critère de l'âge.

L : Avouez que ce serait compliqué à mettre en place... Sans compter que je ne pense pas qu'on soit très objectif concernant nos enfants...

C (sans tenir compte de la remarque) : Regardez ma fille par exemple. Elle est déjà très éveillée et puis surtout, elle est propre. Plus besoin de lui mettre des couches.

C'est le moment qu'a choisi la charmante enfant en question pour s'accroupir au milieu de la boutique et uriner tranquillement, sous le regard des clients totalement sciés.

C (écarlate) : Je vais ramasser.

L : Je confirme oui.

 

6) Une cliente pyromane

C (récupérant les sept livres qu'elle vient d'acheter) : Vous savez, je lis en moyenne quatre livres par jour !

L : Hé bien, vous avez un sacré rythme.

C : Oui, c'est pour ça qu'on en brûle beaucoup.

L (interloquée) : PARDON ?!

C : Je brûle mes livres. Ma fille et moi, on est toutes les deux de grandes lectrices. Donc vous vous doutez bien qu'on a plus de place.

L (scandalisée) : Mais vous pourriez les donner ! Les revendre sur Internet ! Ou les offrir à des associations !

C : Oh non, c'est trop contraignant. Je ne vais pas m'embêter avec ça.

Soudain, la cliente regarde un livre posé sur le côté du comptoir, Dans ma tête je m'appelle Alice de Julien Dufresne-Lamy. Elle va pour s'en saisir.

C : Je vais prendre celui-ci aussi.

L (horrifiée) : NON !

La cliente recule sa main, perplexe. L, se saisissant du livre et le serrant contre elle pour le protéger :

C : Celui-ci... Il est réservé, vous comprenez ?

L (suspicieuse) : Je vois...

Oui je sais je n'ai pas l'âme d'une vraie commerçante...

Mais il est hors de question que cette barbare

crame un Dufresne-Lamy ! Moi vivante, jamais !

 

7) Une cliente exi-chiante

C : Je voudrais un roman.

L : Bien sûr, vous avez une préférence pour le genre ?

C : Un livre détente, sans prise de tête.

L : D'accord.

C : Et qui fasse l'unanimité.

L (surprise) : J'ai bien peur que ça n'existe pas.

C : Comment ça ?

L : L'art, donc l'écriture, c'est subjectif. On ne peut jamais plaire à tout le monde. C'est ce qui rend chaque expérience unique ; il y a forcément des avis divergents.

C : Et bien donnez-moi un livre qui a reçu d'excellents retours des lecteurs alors. ça, ça devrait être dans vos cordes, non ?

C : ça semble parfait. Vous l'avez lu ?

L : Oui.

C : Et vous avez aimé ?

L : Non.

 

8) Client & masque, l'éternel débat n°1

L (à un autre client qui veut rentrer dans la boutique à visage découvert) : Excusez-moi Monsieur mais vous ne pouvez pas rentrer sans masque ici.

C (met le masque en bougonnant) : Grumble... Fait chier... Grgrn... Casse les couilles avec leur masque à la con.

L (poliment) : Moi, ce qui commence sérieusement à me casser les pieds, c'est de devoir gérer des clients irascibles dignes de gamins capricieux incapables de comprendre des règles aussi simples !

C (confus, bougonnant encore) : Pardon... L : Y a pas de mal.

 

9) Client & masque, l'éternel débat n°2

L (à un autre client qui veut rentrer dans la boutique à visage découvert) : Excusez-moi Monsieur. Vous ne pouvez pas rentrer sans masque ici.

C : Je veux juste prendre un journal.

L : Ce n'est pas la question. Personne ne rentre sans masque à la librairie.

C : Mais j'en ai pour deux minutes.

L (avec moult soupirs) : Monsieur...

C : Bon bah apportez-le moi, le journal ! Comme ça j'ai pas à rentrer.

L : Ce n'est toujours pas la question.

C (furieux) : Vous préférez que je rentre chez moi et que je vous paye pas ?

L : Très franchement, oui.

C (haussant le ton) : Si je m'en vais maintenant, je remettrais plus JAMAIS les pieds chez vous.

L : Je pense que je devrais survivre à une perte de 1 euros 30 dans mon chiffre d'affaires journalier.

 

10) Client & masque, l'éternel débat n°3

C (le retour de notre experte en draguouille favorite et oui, vous allez voir, elle n'est pas juste sexiste, elle donne bien dans la xénophobie aussi) : J'en peux plus de ces masques. Moi, je n'appelle pas ça vivre ! Je ne peux même plus aller m'acheter un soutien-gorge en ville, vous vous rendez compte ?

L : Dites-vous que c'est pour assurer la sécurité du plus grand nombre, y compris la votre.

C : La sécurité, la sécurité... Je suis pas une chinetoque moi, il est hors de question que je vive comme une bridée !

L : En attendant, je vous ferais remarquer que du côté des asiatiques, Taiwan compte moins de dix décès depuis le début de l'épidémie. Et ce grâce à leur gestion admirable de la crise sanitaire.

C : Ils devrait avoir le triomphe modeste... Après tout, c'est de leur faute : on leur a pas demandé de manger du pangolin, nous !

L : Oh et moi qui pensais que c'était un tout petit peu plus compliqué qu'un régime alimentaire douteux à base d'animaux en voie de disparition...

 

Et bien voilà, je pense qu'on a fait le tour ! Le plus triste là-dedans, c'est sans doute que ces dialogues soient vrais...

Histoire de respecter la tradition, je vous laisse sur une citation ô combien vraie d'Henri-Frédéric Amiel : "L'idiot n'a point de cervelle, mais il a le croc venimeux" !

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