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L’avis des libraires - 174ème chronique : Le petit garçon qui voulait être Mary Poppins

L’avis des Libraires : 174ème chronique Le petit garçon qui voulait être Mary Poppins d'Alejandro Palomas Une fable touchante mais maladroite

Guille est un enfant à l'imagination florissante, exalté d'un rien, épanoui en toutes circonstances... Pourtant, son institutrice Sonia et la psychologue scolaire Maria s'interrogent : Guille va-t-il aussi bien qu'il le laisse paraître ? Quels secrets habitent ce petit garçon qui veut être Mary Poppins ?


Une jolie couverture colorée signée Catrin Welz-Stein, un titre poétique et un accueil enthousiaste... Nul doute que Le petit garçon qui voulait être Mary Poppins d'Alejandro Palomas a su conquérir le cœur de nombreux lecteurs.

Il est vrai que cette fable touchante sur l'enfance, les rapports filiaux, le deuil, l'amitié, le regard des autres, véhicule d'emblée une grande sincérité, alternant douceur et mélancolie. Le fond respire la candeur, l'espoir, sans que l'on ne tombe dans le pathos ou la niaiserie – une sacrée prouesse.

Quant à la forme, la plume fluide et imagée, de même que l'alternance de points de vue des différents narrateurs, permettent de s'immerger dans l'histoire sans la moindre difficulté.

Là où l'auteur excelle surtout, c'est dans sa faculté à se glisser dans le petit monde d'un enfant avec sa fragilité, ses peurs, ses doutes, ses idées, ses envies, sa détermination... La sensibilité du jeune héros est évoquée avec une absence totale de stéréotypes, il est attachant, bouleversant, complexe – certaines de ses réflexions loufoques le rendent d'autant plus mignon. On sent l'affection protectrice que porte le romancier à son protagoniste, une tendresse qu'il communique à son lectorat.

On ne peut qu'être touché par la relation difficile qu'entretiennent Guille et son père : Manuel est bourru, parfois borné, victime de cette image d'homme viril qu'il tente d'afficher en toute circonstance, inapte à comprendre l'univers lyrique où son fils s'épanouit... Fils qui, pour le meilleur comme pour le pire, s'avère être le portrait craché d'une maman absente, tant dans les traits que dans le caractère. La vision fascinante d'Amanda, mère bohème, épouse fantasque et aimante, déifiée par l'un comme par l'autre, surplombe l'ensemble du roman – on brûle de rencontrer cette hôtesse de l'air britannique amoureuse de voyages, de comédies musicales et de liberté.

Si le dénouement est assez prévisible, l'intérêt ne réside pas tant dans la trame que dans la vision pleine de justesse de cette famille brisée : un père maladroit qui tente de faire de son mieux, une mère sacralisée trop parfaite et un petit garçon en manque de repères et d'affection, porté par son intense besoin de rêver tout en protégeant son entourage... Manuel et Guille sont remarquablement abordés, de même qu'Amanda – laquelle n'est pourtant jamais présente autrement que dans les souvenirs ou les pensées. La camarade de classe Nazia, alliée inconditionnelle du jeune héros, est aussi un excellent personnage de soutien, que l'on aurait aimé voir exploiter davantage.

En revanche, Sonia, la professeure de Guille reste trop superflue pour être marquante, d'autant qu'elle est très vite reléguée au second plan. De même, il y a un véritable problème vis à vis de Maria, la psy scolaire. Non seulement elle possède un instinct déplorable qui l'empêche de tirer des conclusions évidentes mais en plus, ses séances avec Guille virent à l'obsession, la poussant à sous-estimer le danger immédiat qui touche d'autres élèves... Bref, un sacré manque de professionnalisme !

Dans les points négatifs qui viennent plomber le récit, on notera aussi le traitement plutôt bancal consacré aux autres cultures et le manque d'approfondissement flagrant de certaines thématiques. Par exemple, on présente « le Coran comme la Bible à l'envers » (entendez dans le contexte : l'islam, c'est mal, la religion catholique, c'est bien !) et même si cette phrase est mise dans la bouche d'un enfant, elle n'en demeure pas moins problématique. Le sujet étant abordé de façon superflue, il est toutefois permis d'y voir une simple gaucherie et non une offense consciente.

En définitive, une agréable lecture qui, par ses maladresses, ne sera hélas pas un coup de foudre !


Le petit garçon qui voulait être Mary Poppins d'Alejandro Palomas paru aux Éditions Cherche Midi, 224 pages, 20€.


Article paru en version écourtée dans le Pays Briard le 16.06.20

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