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L’avis des libraires - 148ème chronique : Merveilles du Monde Hurlant, tome 2 - La Mer des Secrets

L'avis des libraires - 148ème chronique

Merveilles du Monde Hurlant,

Tome 2 - La Mer des Secrets de Julien Hirt

Retour à Entremer

Trahie et brisée, Tim n'a plus qu'un seul objectif en tête : se venger. Elle doit pour cela se reconstruire et affronter ses démons intérieurs. Pour l'heure, elle est de toute façon loin de sa cible, exilée au beau milieu de l'océan sur un rafiot pirate... Aura-t-elle le courage de rejoindre Entremer ?


Malgré un avis mitigé concernant La Ville des Mystères, j’avais été conquise par le dénouement grandiose de ce premier tome et l’évolution promise pour notre héroïne... De gamine capricieuse, Tim semblait en effet destinée à devenir une redoutable justicière, prête à en découdre avec ses fantasmes d’adolescente. Ainsi n’avais-je qu’une hâte : découvrir ce que Julien Hirt manigançait pour ce second volet, volet mettant de surcroît un terme à ses Merveilles du Monde Hurlant !

La Mer des Secrets possède les mêmes qualités que son prédécesseur, à savoir un univers riche, une jolie plume, une profusion de peuples en tout genre, une faune atypique, une intrigue addictive et des personnages secondaires attachants - S et Clil restent des figures féminines fortes et intéressantes qu’on prend plaisir à suivre au fil de la trame.

Se balader dans le Monde Hurlant, c’est découvrir avec une joie intacte ses créatures et sa flore singulières, tels que le moaï, un scarabée devin, ou le terrible kraken dont la traque n’est pas sans rappeler les sombres heures des baleiniers et l’oeuvre mythique Moby Dick ; les cristaux d’Entremer, entités à la sensibilité singulière, sont remarquablement utilisés ici ; enfin, les Penguri, Hommes-Pingouins aux commandes du curieux vaisseau le Rapidouc, comptent parmi les points forts de l’ouvrage.

Hélas, Julien Hirt ressasse également ses vieux travers, à commencer par une narratrice toujours aussi insupportable. Tim ne mûrira (finalement) pas d’un pouce avant les vingt pages ultimes, faisant fi du changement sous-entendu précédemment. Sa prise de conscience tardive, si elle lui offre un arc convenable, la rend antipathique les trois quart du roman. Chapitre après chapitre, elle apparaît comme plus odieuse, plus égoïste et donc d’autant plus agaçante ! Il faut dire que Mademoiselle se permet toujours d’émettre des jugements sur tout et tout le monde, alors qu’elle même ne se gêne pas pour briser le cœur de ses ami(e)s et trahir la confiance des nouveaux venus, Juan Scorpio en tête.

De même, elle manque cruellement d’empathie, notamment lorsque l’animal domestique de l’une de ses amies se sacrifie pour sauver leur camarade et qu’elle affirme texto n’en avoir rien à battre. Comprenez : sa vengeance passe avant tout et le sacrifice des autres, à fortiori d’un animal de compagnie, ça ne compte pas ! Toujours si raffinée et touchante, notre héroïne...

Autre défaut majeur : certains protagonistes sont très mal exploités. Cette critique pouvait déjà être formulée avec le personnage de Drendel dans le premier opus, c’est le cas dans la seconde partie du diptyque mais de façon quasi omniprésente ! A commencer par Juan, un anti-héros prometteur qui avait débarqué en fanfare dans La Ville des Mystères mais n’est que peu présent, tout comme la fameuse Mer des Secrets d’ailleurs.

Même problème du côté de la dompteuse d’araignées Pilar Pia, des chefs dissidents Alexambre et Hakoub, ainsi que des jumeaux ogres Rahil et Raghil : tous véhiculent de très bonnes idées qui, par la suite, n’auront que peu d’impact. La bande de comédiens, si attachante dans le premier tome, connaît un destin fort peu glorieux, même si cette décision est justifiée par une pirouette scénaristique plutôt difficile à avaler.

Les antagonistes phares s’avèrent plutôt limités. Carniato, le dictateur haineux est limité à sa cruauté et sa malveillance envers les jeunes, sans profondeur ni autre singularité. Siméon et Ermengrade, le couple de mercenaires, ne connaissent guère mieux. Mais la palme de la déception revient à Voland : pompeux et risible comme Carniato, il n’est qu’une pseudo divinité despotique peu inspirée. A noter que tous deux tombent dans le stéréotype du méchant qui s’égare dans des monologues interminables alors que les héros sont en mauvaise posture...

Une exception cependant en la personne de Vortices 47, la plus fascinante tortionnaire de Tim qui connaît, elle, un sort à la fois bouleversant et inattendu.

Vous l’aurez compris mais ce livre, comme le précédent, est plutôt problématique à mes yeux : malgré toutes ses qualités, malgré son imaginaire foisonnant, il souffre de son héroïne profondément agaçante et du développement décevant accordé aux autres personnages. Toutefois, son dénouement épique, sa conclusion émouvante et l’évolution de Tim rendent le tout relativement satisfaisant... On reste pourtant sur notre faim, tant on espérait une apothéose qui, malheureusement, n’a pas eu lieu.

Reste toutefois la hâte de découvrir les prochains projets de Julien Hirt, portés par sa sensibilité toute particulière pour le steampunk*.

 

~ La Galerie des Citations ~


« Il n'y a aucun intérêt à participer à une élection si tu n'es pas sûr de gagner. »

~ p 56 / Juan Scorpio


​« Pourtant, elle était plus belle que dans mon souvenir. Une beauté triste et solennelle, sa silhouette de lionne inspirant le respect et l'admiration. »

~ p 127 / Tim retrouve S


​« On n'arrête pas de nous parler de ces météorites à la trajectoire folle qui, un jour ou l'autre, sans prévenir, sans raison, sans même essayer de faire le mal, pourraient entrer en collision avec notre monde et détruire en un instant toute vie telle que nous la connaissons. On oublie de mentionner que ces météorites, c'est nous-mêmes. »

~ p 135-136 / Tim

 

Julien Hirt : Merveilles du Monde Hurlant, Tome 2 - La Mer des Secrets aux Editions Le Héron d'Argent. 325 pages. 20€.


Article paru sous forme abrégée dans le Pays Briard le 22.10.2019


* Sous-genre de la SF prenant généralement place dans des XIXe-XXe siècle emprunts de fantaisie et caractérisés par l'utilisation de technologies inspirées par notre révolution industrielle : les machines à vapeur y sont notamment à l'honneur.

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