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L’avis des libraires - 116ème chronique : Je peux très bien me passer de toi !

L’avis des Libraires : 116ème chronique

Je peux très bien me passer de toi de Marie Vareille

Plutôt Chloé, Constance ou Charlotte ?

Chloé et Constance mènent des vies diamétralement opposées : l'une est décomplexée, séductrice et s'enlise dans une histoire d'amour vouée à l'échec ; l'autre est timide, romantique et craque désespérément sur un inconnu entrevu une unique fois.

Réunies par leur passion de Jane Austen et les galères quotidiennes, les deux amies passent un pacte, arbitré par leur copine Charlotte. Exilée à la campagne, Chloé devra faire abstinence durant six mois et se focaliser sur son roman. De son côté, Constance aura pour mission de se dévergonder, accepter les amants d'un soir et tenter de séduire son fameux inconnu. Autant dire que le défi n'est gagné ni pour l'une, ni pour l'autre...


En 2015, Marie Vareille avait fait sensation avec son roman Je peux très bien me passer de toi. Véritable phénomène, cette comédie feel-good, fantasque et féministe, avait emporté les lectrices de tout âge. Fin 2018, les aventures de Chloé et Constance s'offraient une toute nouvelle édition, un tirage luxe au nombre d'exemplaires limité.

Un format poche, une couverture scintillante et lumineuse, un prix accessible... Si vous êtes passés par deux fois à côté de la tornade littéraire Vareille, voilà une bonne excuse pour vous laissez emporter ! Cette lecture vous assure des héroïnes fortes, beaucoup d'humour et quelques larmes.

Dès les premières pages, le style saute aux yeux : c'est fluide, pétillant, léger... L'auteure a un certain sens de la description, tant dans les personnages que les lieux qu'ils sont amenés à fréquenter - des rues parisiennes aux quartiers londoniens en passant par les paysages bordelais. La plume porte à merveille les péripéties de ces deux amies aux caractères si différents, bien décidées à changer de vie.

Et du changement, inutile de dire qu'il va y en avoir durant ces 350 pages ! L'intrigue est riche en rebondissements, addictive, enlevée... Pourtant, loin de l'habituel road-trip de comédie romantique, Marie Vareille offre surtout une très belle réflexion sur le deuil, quelle qu'en soit la nature : la perte d'un amour, d'un être cher, d'un fantasme, d'un bonheur familial dont il faut malgré tout se relever... Tout positif et enjoué que soit ce roman, il n'est donc dépourvu ni de profondeur, ni de très beaux moments d'émotion.

On prend d'emblée en sympathie Chloé, Constance et leur entourage. Chloé, délurée, distante et un peu perdue, qui tente tant bien que mal d'oublier son ex ; Constance, si lunaire, indécrottable romantique et gaffeuse invétérée, qui cherche l'alter-ego moderne de Darcy et fuit son patron comme la peste ; Mamie Rose, douce, intelligente, soutien inébranlable de sa petite-fille Chloé ; l'experte en séduction Emma ; la généreuse photographe Virginie ; l'intraitable Hans ; le fantasque Tonton Gonz ; le mystérieux vigneron Vincent ; et puis surtout, Charlotte, l'épouse raisonnable, la maman un peu larguée, la guide spirituelle de ces deux copines abonnées aux catastrophes... Le lecteur voit ces personnages se croiser, évoluer, s'abandonner aux doutes, aux envies et au chagrin, pour mieux se relever par la suite.

En ce sens, le parcours de Constance, tant psychologique que physique, est sans doute le plus édifiant et sans conteste le plus drôle ! Rarement on aura lu une Miss Gaffes aussi attachante que celle-ci - d'autant qu'elle nous est dévoilée avec beaucoup d'autodérision par les extraits de son journal intime. Surtout, le personnage permet de contrebalancer les graves enjeux centrés autour de Chloé, une héroïne infiniment plus complexe et dramatique. Vareille alterne donc avec habilité les passages comiques et les chapitres plus graves. Constance, c'est le souffle d'air frais qui habite ses pages, l'équivalent français de Bridget Jones, l'amie fidèle qui accumule les bourdes et passe son chagrin dans les calories tel un chat face à un sushi-bar ! Aucun doute : Chloé, Constance et Charlotte forment un trio absolument génial, solidaire et complémentaire.

Alors certes, ces pérégrinations féminines connaissent un dénouement plus que convenu et assez prévisible... Pour autant, ne boudons pas notre plaisir : Je peux très bien me passer de toi est aussi rafraîchissant qu'un mojito en plein été, aussi revigorant et gentiment doux-amer.

 

« ça doit être génial d'être Sophie, d'avoir trois ans, d'avoir Charlotte pour maman. De ne pas savoir ce que c'est qu'un smartphone, un tampax, une capote, un shot, une vie qui défile tous les jours un peu plus vite et qu'on est en train de rater. De croire dur comme fer que le marchand de rêves de la rue des Etoiles vous attend pour vous emmener très loin sur sa moto volante. »

~ Chloé / p 21

« Je pourrais la regarder parler pendant des heures. Chloé est une héroïne de roman, belle, sombre, passionnée, écorchée vive, elle a une vie palpitante et dramatique. Chloé est une artiste. Chloé écrit des poèmes depuis qu’elle a huit ans.

Sa vie me fascine. Je la vis par procuration. Il faut dire que ma propre vie est en toute objectivité complètement pathétique. Chloé, elle, n’entrera jamais dans le cercle vicieux du No Sex Land dans lequel je suis bloquée depuis vingt-neuf mois. Si j’étais Chloé, je pourrais sortir avec qui je veux. Je pourrais sortir avec Tristan Grant. Si Tristan la rencontrait, avec ses grands yeux bleus mélancoliques trop maquillés, cette peau de rousse hallucinante chez une brune, sa voix chaude et grave comme un verre de Sauternes, il tomberait fou amoureux d’elle. Il y a quelque chose chez elle. Une façon de parler, de souffler sa fumée, de tenir sa cigarette en se mordillant l’ongle du pouce, de vous dévisager avec des yeux d’enfant rêveur… À côté d’elle, je me sens encore plus courge que d’habitude, Tarte-woman qui prend un verre avec Catwoman. »

~ Constance au sujet de Chloé / p 28

« J'ai ouvert la bouche, je voulais lui dire que ce roman avait bouleversé mon adolescence, que j’étais tombée éperdument amoureuse de Mr Darcy, et que je considérais Jane Austen comme officiellement responsable de l'échec absolu de ma vie sentimentale, ainsi que de celle de toutes ses fans, puisque toutes les femmes cherchent dans leur vie à rencontrer un Mr Darcy et qu’aucun homme sur cette planète n’a la moindre idée de qui est Mr Darcy. »

~ Constance sur Orgueil et préjugés / p 56

« Même avec quarante-huit heures de recul, ce n’est pas évident de décrire James Cunningham.

Disons que si Jude Law et Hugh Grant avaient décidé de faire un enfant ensemble et si Ryan Gosling s’était penché sur son berceau à sa naissance pour lui faire don de ses abdos, cela aurait sans doute donné James Cunningham. »

~ Constance / p 207

« J'avais décidé de me calmer sur l'alcool, parce qu'au rythme où j'y allais, la seule chose que j'allais apprendre de Marilyn Monroe, ce n'était pas la séduction mais l'alcoolisme. »

~ Constance / p 222

« Grave erreur souvent commise par la gent féminine à qui on enseigne bêtement depuis des siècles et des siècles qu'il faut se faire désirer. C'est tout le contraire : il ne faut surtout pas se faire désirer. L'homme du vingt-et-unième siècle est un être prosaïque et impatient à l'ego hypersensible. »

~ Constance / p 222-223

« Je t’aime, ma Chloé, tu es une fille extraordinaire, souviens-toi d’Oscar Wilde : ne tombe jamais amoureuse de quelqu’un qui te traite comme si tu étais ordinaire. »

~ Mamie Rose à sa petite-fille / p 227

« Dans ce monde d’abrutis, une fille couche toujours trop ou pas assez. La vraie liberté, c’est de faire ce qu’on a envie quand on en a envie et sans se poser de questions. »

~ Charlotte à Chloé et Constance / p 336

 

Je peux très bien me passer de toi ! de Marie Vareille, paru aux Éditions Charleston, 352 pages, 9€90.


Article paru en version courte dans le Pays Briard le 12.03.2019

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