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  • Photo du rédacteurChloé

Cin’express : Février 2019

🎥 Cin’express :

Février 2019 🎥

 

🎬 Happy Birthdead 2 You : 3,5/5

En 2017, une comédie horrifique avait suscité la curiosité puis l'engouement des spectateurs. Ce film, c'était Happy Birthdead. Le postulat était simple mais terriblement rafraîchissant, cassant tous les codes du slasher à grands coups de batte de Baseball : Tess, une étudiante profondément antipathique, se retrouve dans une boucle temporelle le jour de son anniversaire où elle se fait tuer à chaque fois ! Comme c'est une vraie garce, difficile de savoir qui lui en veut au point de vouloir l'assassiner... Au fil de ces aventures, variation d'Un jour sans fin à la sauce hémoglobine, elle va évoluer, trouver l'amour, repartir sur de bonnes bases avec son père et devenir une véritable héroïne d'action au cours d'un show décomplexé et mortel d'1h40.

Happy Birthdead 2 You est une suite directe au premier film et se veut plus barré, plus gore et plus jouissif que son prédécesseur. Triss est de nouveau coincée dans sa boucle temporelle mais... Dans un univers parallèle ! Bénéficiant d’un budget largement supérieur, Christopher Landon (déjà réalisateur du précédent) se permet toutes les extravagances possibles. C'est fun, décomplexé et très innovant sur la forme, poussant encore plus loin le concept d'Happy Birthdead.

Triss confirme également sa place aux côtés des survivantes les plus cools du genre, aux côtés de Laurie (Halloween) et Sidney (Scream). Elle est impeccablement campée par Jessica Rothe, toujours aussi charismatique. On peut également saluer le retour de l'ensemble des personnages et de leurs interprètes, à commencer par Israel Broussard (Carter), Phi Vu (Ryan) et Ruby Modine (Laurie), décidément très à l'aise et convaincants dans leur rôle.

Le film se permet aussi de jolis moments d'émotions et, à défaut d'être subtile, pose des thématiques intéressantes : choisir entre deux personnes qu'on aime plus que tout, renoncer au passé pour progresser dans le futur, se dépasser, se sacrifier, se révéler plus brillant qu'on n'aurait jamais pensé l'être à force de travail... En bref, endurer, tomber et toujours se relever. En cela, Triss est un exemple de détermination et certainement l'un des meilleurs modèles pour les adolescentes friandes de ce type de films mais lassées par le sempiternel cliché de la damoiselle en détresse.

Malheureusement, Happy Birthdead 2 You s'inscrit aussi dans la tendance de nombreuses productions actuelles : cette volonté, lassante, de vouloir tout expliciter, tout le temps ! Pas une once de mystère, de zone d'ombres, ne sont laissées au public. Or, à moins qu'il soit doté de l'imagination des scénaristes d'Annabelle (proche du 0 absolu donc), aucun spectateur ne souhaite pareil déballage. Pour démarrer ce second volet, la boucle temporelle a droit à son explication tirée par les cheveux : elle gâche au passage toute l'énigme du premier opus, ce qui est bien dommage.

Hormis ce départ plutôt chaotique et une ambition comique qui tend dans la surenchère un peu facile, Happy Birthdead 2 You reste un divertissement correct, très sympathique.

Et puis, en toute honnêteté : on ne se lasse pas de voir la belle Triss défoncer des crânes avec tout ce qui lui passe sous la main...

 

🎬 Ralph 2.0 : 3/5

En 2012, Disney évoquait avec brio l'univers du jeu vidéo dans Les mondes de Ralph, OVNI cinéphile coloré et émouvant, loin des clichés attendus. Une belle aventure qui narrait l'amitié entre Ralph, un "méchant" aspirant à devenir plus que son rôle de mastodonte destructeur relégué au ban de la société, et Vanellope, une pilote aux bugs imprévisibles et héroïne d'un jeu de courses aux décors gourmands.

Cette suite fait la part belle aux références pop culture : il faut dire que Ralph 2.0 élargit grandement le monde de nos deux héros qui se retrouvent cette fois au cœur d'Internet ! Disney en profite également pour se pasticher lui-même avec beaucoup de second degré, montrant son empire sous un angle plus décomplexé. Cette vision de la toile par le studio à grandes oreilles est réellement jouissive, démontrant l'inventivité des studios lorsqu'il s'agit de croquer avec humour ce qui nous entoure. L'humour reste le point fort de cette séquelle, de même que la relation des deux protagonistes. Visuellement, rien à redire non plus : c'est ébouriffant.

Le fond, en revanche, est nettement plus bancal. L'idée de base est intéressante. Tout comme Ralph dans le premier film, Vanellope aspire désormais à de nouveaux horizons, à vivre des aventures plus palpitantes hors de sa zone de confort... Et donc loin de son meilleur ami ! Leur relation fusionnelle est mise à rude épreuve car les choix de Vanellope les éloigneront fatalement l'un de l'autre et ils devront s'acclimater à cette distance. Ralph prend naturellement très mal cet éloignement et cherche à retenir la jeune fille contre son gré.

C'est là tout le problème : si la morale est sauve (l'amitié ne se résume pas à la proximité et chacun est libre de mener sa vie comme il l'entend), l'intrigue nuit fortement au personnage de Ralph. Là où notre géant au cœur tendre avait progressé, s'était accepté et avait évolué au prix d'un long travail sur lui-même, ici il semble avoir très clairement régressé. Ralph est devenu antipathique, un peu bête, et fait presque figure d'antagoniste vis à vis de Vaneloppe, développant une obsession quasi malsaine pour elle ! Il est clairement toxique pour cette dernière et le pardon final ne suffit pas à effacer tout ce qu'il était prêt à faire pour la garder à ses côtés ! Le dénouement excuse une amitié toxique, basé sur la manipulation et le mensonge, ce qui passe très moyennement lorsqu'on analyse un peu le scénario. C'est d'autant plus regrettable que Ralph était sincèrement attachant dans le volet précédent !

Ce sabotage de protagoniste est d'autant plus visible que la pilote, elle, est mise en avant au détriment du reste de l'intrigue et quasi idéalisée, gommant tous les petits défauts qui la rendaient authentique. Ses interactions avec d'autres héroïnes - les princesses Disney, l'algorithme Yessss et la pilote ô combien badass Shank - restent malgré tout très distrayantes à suivre.

Dans les points noirs, on regrette aussi la quasi disparition du couple Felix/Calhoun, pourtant l'un des points forts du premier opus. Les nouveaux personnages ont beau être sympathiques (Shank, YESSSS, la recherche intuitive Jesaistout et le gentil Spamley en tête), il n'empêche que l'absence du duo se fait clairement sentir.

Une suite très drôle mais au message discutable, correcte mais décevante malgré tout.

 

🎬 Dragons 3 - Le monde caché : 4/5

Après un parcours sans faute, la saga culte de Dreamworks, Dragons, se termine cette année avec un troisième opus : Le monde caché. Une conclusion à la hauteur ?

Oui. Bien plus qu'une fin honorable, le dernier volet a su se renouveler tout en conservant les points forts de ses prédécesseurs : des aventures épiques, une amitié transcendante entre Harold et Krokmou, le passage de l'adolescence à l'âge adulte, l'épanouissement personnel, la confiance en soi, le rapport à l'animal...

Visuellement, le film est d'une beauté à couper le souffle, qu'il s'agisse du sauvetage des dragons en début de film, du fameux monde caché ou de la Furie Éclair. La relation entre cette dernière et Krokmou offre plusieurs scènes de parades amoureuses, qui sont soit hilarantes, soit magnifiées par la poésie du long-métrage. Les ballets aériens entre les deux dragons sont réellement grandioses et, tout comme Harold, le public suit le duo avec une fascination intacte durant plus d'1h30.

Sur la forme, c'est un succès ; sur le fond, c'est une réussite quasi-totale. Car le film se distingue par ses différents niveaux de lecture, par l'achèvement de ce parcours initiatique qui a fait rêver petits et grands durant 9 ans.

Au cours de la dernière décennie, les spectateurs ont suivi les aventures du dragonnier et de sa Furie Nocturne, leur évolution, leur aspiration, leur relation... Le rapport Harold/Krokmou reste au cœur de la saga mais ils ont grandi et le jeune chef comprend rapidement que la séparation est inévitable. Harold est passé d'enfant rêveur à adolescent passionné pour enfin s'imposer comme un chef sage aux idées révolutionnaires.

De la même façon, le peuple de Beurk a vu sa vision des dragons évoluée, un peu comme la façon dont l'Homme considère les créatures sauvages : de menaces, ils sont devenus des animaux domestiqués et aimés, avant que leurs possesseurs ne prennent conscience de la nécessité de les laisser libres tout en assurant leur sécurité. Il est vrai que les similitudes entre Krokmou et un grand chat ailé le rapproche plus de la panthère que du traditionnel lézard volant ; la comparaison est donc d'autant plus facile à établir, de même que la sympathie du public pour le petit dragon - laquelle n'a jamais faibli depuis sa création par Dean DeBlois et Chris Sanders en 2009. Ce parallèle entre le monde fictif de Dragons et notre Histoire est à la fois subtile et intelligente, curieusement engagée ; le message s'ancre doucement dans l'esprit du jeune public, sans chercher à le lui imposer par la force, ce qui est d'autant plus appréciable.

Un scénario mené d'une main de maître, des personnages attachants et une animation en images de synthèse époustouflante... Difficile, donc, de ne pas sentir l'émoi nous prendre à la gorge lors des dernières minutes du film.

Peu importe, dès lors, que quelques petites fautes se soient glissées dans l'intrigue, tels que l'omniprésence des jumeaux Kognedur/Kranedur en comic-relief, le rôle très secondaire de Valka, un pseudo-braconnier en antagoniste peu impressionnant et un final trop idéalisé. Ce dernier long-métrage pâtit surtout de la perfection du second opus, supérieur tant dans l'émotion que dans les enjeux. Il n'en demeure pas moins une belle réussite. La conclusion (pratiquement) parfaite d'une trilogie qui l'est tout autant.

On quitte Harold et Krokmou avec un sourire touché, une pointe de nostalgie peut-être, conscients d'avoir assisté à une oeuvre aussi sincère qu'intemporelle. Sans aucun doute, Le monde caché est venu clore en beauté l'une des meilleures sagas animées de l'ère 2000.

 

🎬 Marie Stuart, Reine d'Ecosse: 3/5

Le destin tragique de Marie Stuart aura inspiré l’Art sous toutes ses formes. Stephan Zweig lui a dédié l’un de ses plus beaux romans, Gaetano Donizetti fit d’elle l’héroïne d’un opéra, le cinéaste John Ford la magnifia en l’incarnant sous les traits de Katharine Hepburn ; la télévision vit dans cette existence d’exception l’opportunité d’une série, Reign, qui a abouti à l’un de ses plus outrageux fiascos, sorte de Gossip Girl anachronique bourré de clichés.

Après la catastrophe signée par la CW, notre souveraine martyre est de nouveau sous le feu des projecteurs.

Son retour en 2019 s’effectue au cinéma avec Marie Stuart, Reine d’Ecosse. La réalisation échut à Josie Rourke, avec en prime un casting quatre étoiles : Saoirse Ronan, Margot Robbie, David Tennant ou encore Guy Pearce... De quoi faire pâlir d’envie n’importe quel cinéphile ! Aucune surprise de ce côté mais un ravissement total car tous sont épatants.

Saoirse Ronan et Margot Robbie campent à la perfection les cousines Marie et Elisabeth, rivales mortelles mais fascinées l’une par l’autre. Leur relation – quoi que simplifiée – et l’interprétation des deux actrices sont d’ailleurs les deux véritables atouts du film. Elles sont magistrales et parfaitement à la hauteur des personnalités tourmentées qu’elles incarnent.

Niveau réalisation, Marie Stuart reste de bonne facture, sans briller par son originalité. Classique, sans innovation majeure, comme la plupart des grosses productions en costumes de ces dernières années. Et, tout comme celles-ci, le film cumule les mêmes travers : de trop grandes libertés vis-à-vis de l’Histoire qui finissent par perdre totalement quiconque s’est déjà intéressé de près ou de loin à la plus française des reines écossaises ! L’ensemble du long-métrage est truffé d’inexactitudes historiques : Marie et sa sœur ennemie finissent par se rencontrer, là où elles n’ont fait qu’échanger des lettres durant toute leur existence ; le colorblind casting est assez contestable puisque l’on évoque des personnages ayant réellement existés ; Saoirse Ronan prend un accent écossais alors que Marie a été élevée en France…

Le comble reste d’avoir réussi à rendre la vie de l’héroïne éponyme encore plus tragique qu’elle ne l’était à l’origine. Sa vie amoureuse, déjà mouvementée, est ici tellement dramatique qu’on la croirait sortie d’un soap-opéra : son ami et confident Rizzio couche avec son second mari, Darnley (rendant l’assassinat du premier par le deuxième totalement improbable et absurde) ; Bothwell, son troisième époux, est montré comme la pire des crapules... Le tout étant, vraisemblablement, destiné à faire le parallèle entre les péripéties sentimentales de cette pauvre Marie avec la relation idéalisée que nouent Elisabeth et Dudley durant le long-métrage.

Malgré les performances des acteurs (dont les nouveaux venus Jack Lowden et Joe Alwyn qui qui imposent leur blondeur d’Apollon aux bras de ces femmes charismatiques), difficile de passer outre les nombreux partis-pris fictifs dans cette œuvre qui se revendique historique.

Une fois n’est pas coutume mais, exceptionnellement, on jouera la carte du chauvinisme et on recommandera davantage le film helvético-français Mary, Reine d’Écosse coécrit et réalisé par Thomas Imbach. La distribution, composée d’acteurs à la notoriété moindre mais tout aussi excellents (Camille Rutherford, Mehdi Dehbi, Sean Biggerstaff, Aneurin Barnard), soutient un scénario bien plus fidèle à l’Histoire. Budget moindre au service d’une réussite indiscutable cette fois.

Les spectateurs qui ignorent tout de Marie Stuart, ou témoignent d’une certaine indulgence, trouveront sans doute le film de Josie Rourke captivant, porté par les grandes et magnifiques actrices que sont Ronan et Robbie. Les autres regretteront d’avoir payé une place de cinéma et préféreront retourner à Stephan Zweig.

 

🎬 La Favorite : 4/5

Yórgos Lánthimos est partout et surtout là où on ne l’attend pas ! Après les très singuliers – d’aucun dirait inaccessibles – Canine, The Lobster ou Mise à mort du cerf sacré, le réalisateur grec s’attaque à l’Angleterre du XVIIIe siècle… Le thème ? La rivalité entre Abigail Hill et la duchesse de Marlborough Sarah Churchill, pour s’attirer les faveurs de la Reine Anne. Une guerre au féminin, fascinante, où tous les coups sont permis, s’érige en coulisses. La fausse ingénue Abigail et la redoutable Sarah vont se mener un combat sans merci pour le pouvoir. Car qui conquiert le cœur de la Reine Anne, aliénée et rongée par la maladie, tient l’empire britannique entre ses mains. Par n’importe qui d’autres, le long-métrage aurait été l’une de ces luxueuses productions en costumes, un peu fade, vite oubliable, destinée à faire fantasmer les adolescentes sur de belles robes d’époque et de voluptueuses histoires d’amour. Mais les femmes, dans La Favorite, ont des serres à la place des ongles, un poignard au lieu de langue et de la glace en guise de cœur. Elles sont manipulatrices, calculatrices, terrifiantes… Captivantes. Rarement portraits de femmes, si sombres soient-ils, n’auront été si fascinants à contempler. Telles des Joconde corrompues, rongées par l’ambition, elles gardent leur part de mystères. A l’image de ces anti-héroïnes, La Favorite échappe à toute forme d’académisme, tant sur la forme que sur le fond. C’est un film dur, impertinent, profondément dérangeant où la violence physique côtoie l’amoralité la plus virulente. Dans les plus hautes castes comme dans les cuisines, on fait payer la beauté de l’une en la brûlant à la soude, on humilie l’autre pour son esprit brillant dans les salons. Féroce et tragique, la concurrence d’Abigail et Sarah, loin des habituelles futilités de courtisans, s’apparente davantage à une lutte destructrice. C’est à la fois captivant et terrible à observer tant Lánthimos a le don de mettre à jour les facettes les plus sombres de l’âme.

Le scénario, haletant, doit également beaucoup à son traitement. La somptuosité des décors, la folie créatrice du réalisateur, la magnifique photographie de Robbie Ryan, la partition emportée de Komeil S. Hosseini… Ici, l’anachronisme est clairement revendiqué et, loin d’être une simple facilité, il ne fait que renforcer le propos et souligne l’intemporalité de ces manigances pour le pouvoir, la notoriété ou la richesse. Les dialogues vénéneux sont divinement bien écrits, sournois et spirituels à souhait – Oscar Wilde n’aurait certainement pas renié le texte soigné de Deborah Davis et Tony McNamara. La version française n’est pas en reste et on peut saluer l’excellente adaptation signée Béatrice Delfe. Mais un texte, aussi bon soit-il, a besoin de comédiens à la hauteur pour garder toute sa verve. Et tous, ici, le sont. Le casting est tout simplement irréprochable. Nicholas Hoult incarne à la perfection le maniéré et perspicace Robert Harley, comte d'Oxford. Mark Gatiss et James Smith sont également remarquables, l’un en conjoint de l’ombre, l’autre en conseiller dépassé. Et il y a bien sûr le solaire Joe Alwyn, révélé par Un jour dans la vie de Billy Lynn et également à l’affiche de Marie Stuart – il joue ici le futur époux d’Abigail, utilisé comme un jouet entre les mains de la jeune femme. Nouveau venu dans le métier, Alwyn semble être un nom sur lequel il faudra désormais compter. Si tous les acteurs sont incroyables, le trio féminin, au cœur du film, est au-delà du mot. Il est prodigieux. Emma Stone campe impeccablement une jeune ambitieuse aux dents longues qui se révèle dans toute sa férocité à mi-parcours ; Rachel Weisz est épatante de panache et de charisme ; Olivia Colman est stupéfiante en reine déchirée, brisée et manipulable, plus perspicace qu’il n’y paraît au premier abord. Trois actrices d’exception, chacune ayant décrochée au passage sa nomination aux Oscars. Une reconnaissance méritée. La cour d’Angleterre n’aura jamais été si violente, si mortelle, si irrévérencieuse, que par la caméra de Yórgos Lánthimos. Un combat en jupons dont aucune combattantes ne sort indemne… A l’image des spectateurs.

 

🎬 My Beautiful Boy : 4/5

Comment réagir, aider, épauler son enfant face à son mal-être ? Comment vivre à ses côtés quand l’addiction prend le pas sur tout, détruit tout, jusqu’à la belle image que l’on s’était faite de ce dernier, de celui qu’on pensait si bien connaître ? Comment gérer son chagrin, sa culpabilité, son sentiment d’abandon, son envie de renoncement ?

Voilà les thèmes que traite Felix Van Groeningen dans son dernier film : My Beautiful Boy. Le réalisateur belge, adepte des sagas familiales tragiques (on lui doit l’éprouvant Alabama Monroe), s’appuie ici sur les autobiographies d’un père et de son fils, David et Nic Sheff. C’est leur histoire, leur point de vue que Van Groeningen adapte sur grand écran, le tout avec une infinie douceur et beaucoup de pudeur. En découle une chronique de vie intense et forte, poignante mais emplie d’espoir, portée par un casting parfait.

Steve Carell et Timothée Chalamet tiennent le haut de l’affiche, complices et malheureux. Le duo, à fleur de peau, est constamment sur le fil, constamment incroyable. Il y a une telle profondeur dans leur jeu, une telle sensibilité, qu’il est impossible de rester hermétique à cette relation père-fils mise à mal par la drogue et le doute. Acteur caméléon, Carell prouve une fois encore sa faculté à exceller tant dans la comédie que le drame, et, loin de ses rôles de bouffons un peu pathétiques, incarne ici un père digne et brisé.

Quant au personnage de Nic, il semble avoir été écrit pour Chalamet, lequel confirme son image de jeune romantique brillant, tour à tour mélancolique et rêveur, poète et rebelle, autodestructeur et talentueux.

Pour camper Nic jeune, le choix s’est porté sur Jack Dylan Grazer, la jeune révélation de Ça - ce dernier démontre encore une fois un talent certain et s’impose comme l’un des jeunes espoirs les plus prometteurs de l’industrie hollywoodienne.

Les actrices, quoi que plus méconnues, sont tout aussi magnifiques dans ces rôles de femmes prises dans la tourmente : Maura Tierney en belle-mère compatissante et inquiète, qui cherche à préserver malgré tout ses propres enfants ; et Amy Ryan en mère dépassée qui aide comme elle le peut un fils distant, lequel l’a tenu éloigné de sa vie, bien loin de la relation fusionnelle qui le lie à son père. Des protagonistes complexes et réalistes dont on sent l’authenticité.

En plus du message, la forme est également une réussite de tous les instants : le film est magnifiquement mis en scène, les couleurs, les cadres, les plans sont excessivement soignés – rien n’est laissé au hasard. Quant à la BO, elle offre un pur moment de bonheur auditif entre les morceaux de Massive Attack, Nirvana, Neil Young, David Bowie ou encore Sigur Rós.

My Beautiful Boy est une biographie bouleversante, militante et authentique. Un récit ravageur comme Felix Van Groeningen sait si bien nous les narrer.

 

🎬 Isn't It Romantic : 3/5 (exclusivité Netflix)

Que ce soit au cinéma ou en littérature, un genre est aussi conspué que lucratif, aussi exagérément stéréotypé que irrémédiablement feel-good. Ce genre, c’est la comédie romantique. Selon votre seuil de tolérance aux niaiseries, vous serez donc plus ou moins réceptifs. Quiconque y est confronté à deux réactions possibles : les plus désabusés en ressortiront exaspérés et auront de quoi jouer les langues de vipère dans un savoureux billet cynique posté sur les réseaux sociaux ; les plus fleurs bleues quitteront la salle des paillettes plein les yeux et des papillons dans le ventre en ignorant royalement les commentaires désobligeants et en calculant les possibilités de vivre une histoire pareille IRL. Car oui, la rom-com est aussi détestée qu’adulée.

A titre personnel, l’auteure de cet article est (vous l’aurez compris) clairement à classer dans la première catégorie et était donc d’emblée tout à fait charmée par le concept de Isn’t It Romantic. Dès ses premiers teasers, ses posters promotionnels délicieusement caricaturaux, le film intriguait autant qu’il charmait ! Car tout, sur le papier, annonçait une absolue réussite. En premier lieu, son réalisateur : après avoir joliment parodié ET renouvelé le slasher avec le génial The Final Girls, Todd Strauss-Schulson semblait le candidat idéal pour porter le projet et dépoussiérer un genre embourbé depuis longtemps dans ses codes. Puis le casting, encore une fois, génial : Rebel Wilson et Adam DeVine (le couple humoristique de Pitch Perfect) en haut de l’affiche avec, pour partenaires, Liam Hemsworth et Priyanka Chopra.

Quant à l’intrigue, rien de plus simple, ni de plus efficace : Natalie, une jeune femme fermée aux relations amoureuses et allergique aux rom-coms, se retrouve parachutée dans un monde parallèle qui semble avoir été créé par Garry Marshall en personne ! Elle doit donc trouver le moyen de s’extraire de la comédie romantique qu’est devenue sa vie et reprendre le cours de son existence normale.

Quatre acteurs talentueux, un réalisateur innovant, un scénario attrayant, une promesse de satyre à peine voilée… Pourtant, force est de constater qu’Isn’t It Romantic ne réussit pas tout ce qu’il entreprend, loin de là. Son problème majeur reste le manque d’audace, de mordant. Comme si le public visé n’était pas capable d’avoir du recul ou du second degré… A l’exception de quelques fulgurances, le film n’assume pas totalement son statut de satyre et se contente donc sagement de jouer avec les clichés propres au genre, à tourner autour de son idée sans vraiment l’exploiter. Résultat : lui qui voulait pointer du doigt la rom-com est au final… Exactement ce qu’il critique. Ironique vous avez dit ?

Pourtant, lorsque Strauss-Schulson se lâche vraiment, notamment dans l’introduction et la conclusion, on prend pleinement conscience du potentiel qui se cachait derrière un tel pitch. Peine perdue : il s’interdit d’être trop osé, trop corrosif ou de délivrer de véritables scènes d’émotion comme il l’avait fait dans The Final Girls… C’est dommage car la leçon apprise par l’héroïne est plus que louable et plutôt éloignée des dénouements habituels : s’aimer soi-même pour s’épanouir enfin. Une leçon déjà explorée – de façon bien plus probante – dans Pénélope, un pastiche moderne de conte de fée avec Christina Ricci et James McAvoy, mais qui reste tout à fait cohérente ici.

On ne peut s’empêcher de fustiger le manque d’aplomb devant la sujet de cette pseudo-satyre. C’est d’autant plus regrettable que les acteurs s’en donnent à cœur joie, en particulier Hemsworth et Chopra qui jouent véritablement sur leur statut de sex-symbol. Soulignons également la performance de Brandon Scott Jones en voisin acariâtre/meilleur ami gay de Natalie et le caméo jouissif de Tom Ellis – le Diable ô combien charmant de la série Lucifer.

Au final, le film est un divertissement honnête, souvent drôle et très bien interprété mais beaucoup trop sage. Et oui, rien n’y fait : Isn’t It Romantic est désespérément… Romantique.

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