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L’avis des libraires - 95ème chronique : Bora-Bora's Bitches

L'avis des libraires : 95ème chronique

Bora-Bora's Bitches de Jacinthe Canet

Découvrez les tribulations désinhibées du 4A !

Exubérantes, déjantées, débordantes d'énergie, jamais opposées à une aventure d'un soir arrosé à grands coups de mojitos, Jacinthe, Pétra, Jane et Phillis sont les redoutables locataires de l'appartement 4A. Cet appartement, c'est leur coin de paradis, au point qu'elles le surnomment affectueusement Bora-Bora. Entre les déboires sentimentaux et professionnels de chacune, les fous-rires entre copines et les fêtes (beaucoup trop) arrosées, elles découvrent que le logement adjacent vient d'être loué à un séduisant jeune homme... De quoi animer encore un peu plus le quatrième étage !


Nous y sommes : le cap douloureux de la rentrée. Retour à la réalité, au boulot, aux corvées, à la grisaille... Aussi, histoire d’illuminer ce triste mois de septembre, je vous propose un roman pétillant, solaire et désinhibé : Bora-Bora’s Bitches, premier tome de la saga de Jacinthe Canet, réédité aux Editions Le Héron d’Argent.

Cette saga, sur le fond en tout cas, ressemble à n’importe quel autre roman féminin. On parle d’amour, de copines, de boulot, de soirée, le tout sur un ton léger… Sur la forme en revanche, c’est toute autre chose : la plume de Canet se veut crue, sans fioriture mais pourtant étonnamment juste et percutante. Résultat : elle a créé des personnages plus vrais que nature, certes imparfaits mais terriblement attachants. Hors de question de prendre des gants pour évoquer la vie de ces filles du XXIème siècle ! Elles jurent quand l’envie leur en prend, assument leurs corps, leurs désirs et soignent leur cuite à grand renfort de viennoiseries.

Chaque membre de ce quatuor est l’incarnation même de la femme moderne libérée. Les locataires du Bora-Bora sont des héroïnes qui inspirent, non pas par la vie qu’elles mènent mais bel et bien par la manière dont elles la gèrent. Elles ont une vie professionnelle épanouie, chacune dans un domaine différent et loin des clichés établis, domaine où par ailleurs elles excellent – organisatrice pour une boite d’évènementiels, infirmière dans le milieu hospitalier, reporter photo spécialisée dans le sport, commerciale pour BMW… Aucune ne gagne des sommes pharaoniques mais chacune peut ainsi se permettre d’être indépendante.

Une indépendance qui se reflète dans la façon dont elles gèrent leurs tribulations amoureuses. Là encore, les préférences et obstacles varient d’une fille à l’autre : Jacinthe est une handicapée chronique du sentiment, Pétra subit encore le fantôme d’un ex destructeur, Jane refuse la fellation en bloc quant à Phillis, elle ne résiste jamais à la promesse d’une proie, homme ou femme… Peu importe au fond car elles auront à cœur de suivre leurs envies, leurs besoins à l’instant T et d’évoluer en conséquent. Lors d’une scène d’altercation particulièrement forte, Jacinthe rappelle à son interlocuteur son droit à disposer de son corps et à ignorer royalement le regard des autres : « Si j’ai envie de me taper une quinzaine de mecs en même temps ça me regarde moi et ma réputation ». Ce livre fait du bien tant il arrive, malgré sa frivolité, à rappeler à quel point les tabous sur le plaisir et l’indépendance des femmes sont arriérés et néfastes. Rappeler l’essentiel dans une comédie ? L’auteure le fait, et mieux : elle le fait avec talent !

Chaque fille est radicalement différente et, bien que son alter-ego de papier soit la principale narratrice, Jacinthe Canet donne également la parole à tour de rôle à Pétra, Jane ou Phillis. Du trio qui encadre Jacinthe, Phillis tire clairement son épingle du jeu : séductrice haute en couleurs, bisexuelle, sexy, grossière, totalement affranchie de l’emprise de la société, elle se révèle une protagoniste secondaire particulièrement intéressante. Chacune de ses apparitions est tordante et son fameux crédo (La vie est une pute mais je suis pire qu’elle) risque de devenir culte… Pour compléter les personnages, il y a la touche testostéronée de l’intrigue en la présence de 4B, le locataire d’en face : un anti-héros plus profond qu’il n’y paraît, bien écrit et qui fera fantasmer bon nombre de lectrices et lecteurs…

Surtout, ces Bora-Bora Bitches – pas si bitch que ça d’ailleurs – ont en commun un élément qui les rend d’autant plus sympathiques : leur si belle amitié, cette amitié qui offre soutien, réconfort et rires. Chaque femme peut se reconnaître dans cette forme d’amour totalement désintéressée qui la lie à une autre. Elles s’entraident continuellement, ne se jugent pas et assurent quand l’une d’elles connaît un passage à vide. Peines de cœur, problèmes familiaux, soucis de boulot… Elles sont présentes, en particulier dans les moments difficiles. Bref, c’est l’amitié, la grande, décrite sous un prisme contemporain et décontracté qui n’en demeure pas moins authentique et touchant.

Ce qui fait également le charme de ce roman, outre son ton impertinent et ses héroïnes géniales, c’est sans aucun doute la façon dont Jacinthe Canet mixe ses références culturelles : Oscar Wilde, Salvador Dali, Buffy contre les Vampires, Blanche-Neige et Nina Simone fricotent avec Larusso, David Guetta, 50 nuances de Grey, Twilight et Ryan Gosling…

Face à un tel moment de plaisir, on ne peut que remercier les éditions du Héron d’Argent pour cette sublime publication qui bénéficie de la couverture chic et choc d’Alexandre Honoré ainsi que des très belles illustrations d’inspiration pin-up de Virginie Siveton ; l’ouvrage trouve ainsi une mise en valeur à sa hauteur, comme toujours avec cette maison d’édition. Une réédition d’autant plus importante que ce titre est le premier de la collection Feel Good & Romance, de quoi sérieusement exciter notre curiosité pour la suite.

Vous l’aurez compris mais Bora-Bora’s Bitches est chaudement recommandé : cette pépite brute signée Jacinthe Canet possède l’humour décomplexé d’Allumeuses, le franc-parler de Girls et le romantisme dévergondé de My P.S Partner... Le tout associé au charme frenchy. Décapant et irrésistible, voilà de quoi dépoussiérer le genre de la chick-lit.

Petite note à l’auteure (sait-on jamais si elle lit cette chronique ^^") :

Chère Jacinthe,

  • Laissez tomber Christian Grey… 4B est plus sexy en tout point. D’autre part, les scènes érotiques vous vont mieux qu’à E.L James.

  • Angel n’égalera jamais Spike. Que ce soit dit et écrit.

  • Il devrait être interdit de rappeler à une adulte émotive la mort de la mère de Bambi. C'est sadique !

YMCA sur vous et votre délicieuse plume.


 

« Du coup, nous sommes un peu les reines du 4e étage. Enfin, on aime à le croire ! Rose et Jack sont les rois du monde dans le film Titanic et nous, nous contentons d'être les reines de notre palier. Mais c'est la crise partout. Comme la plupart des gens, nous avons dû revoir nos revendications à la baisse »

~ p 10 / Jacinthe

« - Vous n'avez jamais eu envie de vous faire l'intégrale, Melle Nitouche ? Les lèvres, au moins ? ça ferait plus propre.

Dans ma tête, je me suis demandé si elle travaillait pour la propreté urbaine, cette pouffiasse. Plus propre, plus propre ! Je t'en foutrais ! Parce que là, tu vois, je suis limite en train de me retenir de ne pas te frapper tellement je souffre. Alors, si tu touches à mes lèvres, moi, je t'épile avec les dents ! »

~ p 51 / Jacinthe


« Alors, Jaja, coupe sexy, ou intégrale ? Dans ce genre de réflexion sur mes poils, j'ai rarement un Diable et un Ange sur l'épaule. J'ai plutôt Chewbacca et Maître Yoda. Et oui, j'ai de sacrées épaules pour une fille !

Donc, au moment où Chewbacca me sort des grognements signifiant : "T'es fatiguée, Jaja, t'as encore de l'alcool dans le sang de la veille, tu vas morfler" ; j'ai Maître Yoda qui me titille depuis l'autre épaule : "Une machine de guerre tu es, ma Jaja. Qu'un mauvais moment à passer cela est." »

~ p 108 / Jacinthe

« Quand je reviens, on retrouve le chasseur. Celui-ci, pour sauver Blanche-Neige, préfère crever une biche pour en présenter le cœur à la méchante reine. Putain ! On a retrouvé l'assassin de la mère de Bambi ! Salaud ! »

~ p 219 / Jacinthe

« Je ne sais pas pourquoi, mais je la déteste déjà. Je sens qu'il y a comme une incompatibilité de caractères. Ses petits seins droits et ses meules toutes fermes me donnent de l'urticaire. Et sa démarche féline... ça devrait être interdit, cette injustice ! Moi, quand je mets des talons, j'ai l'impression d'avoir pris cher toute la nuit.

Et n'allons pas imaginer que c'est de la jalousie : c'est facile d'être bien gaulée à dix-huit ans. On en reparle dans dix ans, ma petite, quand ton corps connaître les joies de la pesanteur. »

~ p 224 / Jacinthe

« Entendre un mioche brailler, hurler et sentir la bouse à des kilomètres, hors de question !

Et qui est le pire, entre le mouflet et sa mère ? Parce que crier haut et fort à qui veut l'entendre que ton chiard est la chose la plus merveilleuse du monde, soit, même si déjà ça sent l'arnaque à plein nez. Mais l'affirmer avec des cernes tellement creusés qu'ils font aussi usages de récupérateur de pluie, c'est vraiment nous prendre pour des cons. Pour ma part, ma chatte est à sens unique : tout y rentre, mais rien ne sort ! Il m'est inconcevable qu'un jour une chose de trois kilos s'en extirpe. »

~ p 284 / Phillis


« Le seul point commun que j'ai avec Dali, c'est la vision qu'il avait de lui-même : "il y a toujours un moment dans leur vie où les gens s'aperçoivent qu'ils m'adorent". »

~ p 289 / Phillis


 

Bora-Bora's Bitches de Jacinthe Canet, paru aux Editions Le Héron d'Argent, 355 pages, 20€. Déconseillé au moins de 16 ans.


Article paru en version courte dans le Pays Briard le 18/09/2018

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