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  • Photo du rédacteurChloé

Princesse Mila & le sorcier au cœur de pierre VS Jacob & sa princesse – le match

Princesse Mila & le sorcier au cœur de pierre

VS Jacob & sa princesse

– Le Match

Il n'y a pas très longtemps (et pas non plus dans un royaume fort fort lointain), en me perdant sur les méandres d'Internet, je suis tombée sur deux films d'animation méconnus : une production russe (Jacob & sa princesse) et ukrainienne (Princesse Mila & le sorcier au cœur de pierre).

Les deux ayant des intrigues similaires mais un traitement totalement différent, je trouvais intéressant de comparer ces contes de fées et d'en souligner les points forts et les points faibles. Surtout, ce match me permet de mettre en lumière des productions cinématographiques peu connues, dont les pays originaux sont rarement mis en avant.

Prêt à retourner au pays des contes avec princesses hardies, nobles roturiers et sorciers à la clef ? C'est parti !

 

Princesse Mila & le sorcier au cœur de pierre (Викрадена принцеса) - 2018

Résumé : Eric projette de devenir chevalier mais hélas, pour l'heure, les seules aventures qu'il peut vivre sont celles écrites par son ami Octave sur les planches d'un théâtre ambulant.

Mila, elle, est la fille du roi. Unique héritière, elle rêve de voyager et s'émanciper enfin de sa cage dorée : aussi, à la suite d'une énième dispute avec son père, s'évade-t-elle du château.

Les jeunes gens se rencontrent par hasard, sympathisent et passent une nuit magique à se promener dans la cité.

Leur bonheur est de courte durée lorsque Mila est enlevée par le sorcier Malafar sous les yeux d'Eric. Ce dernier se lance aussitôt à sa recherche, escorté d'Octave et Houna, sa courageuse hirondelle...

Les + :

  • Une animation à gros budget : La première chose qui frappe au visionnage de ce film ukrainien, c'est sans conteste les moyens déployés autour : un budget de 5 millions de dollars qui place clairement le DA dans la cour des grands. De fait, l'animation, si elle n'atteint pas la perfection actuelle d'un Pixar ou Dreamworks, est très agréable à suivre : les mouvements des personnages sont fluides et les paysages magnifiques.

  • Une intrigue palpitante et un dénouement intense : Le concept de la princesse sauvée par un homme aventureux de rang inférieur n'est certes pas nouveau, loin de là. Pourtant, le film parvient à dépoussiérer le genre à grands renforts d'humour et de péripéties aussi trépidantes qu'originales - les différents lieux traversés par les protagonistes durant leur quête, très singuliers, n'y sont pas étrangers. L'idée de suivre parallèlement Mila (prisonnière d'un château magique mais bien décidée à s'évader) et la bande d'Eric à sa rescousse permet de ne pas délaisser le duo principal ; elle souligne aussi l'importance et l'indépendance de la princesse, loin de la demoiselle en détresse classique. L'opposition finale entre les héros et Malafar est très bien menée ; elle dure suffisamment longtemps, avec plusieurs retournements de situations, pour que l'on saisisse l'apprêté du combat.

  • Une BO sympathique : Qui dit gros budget dit également bande-originale ! A fortiori lorsqu'il s'agit d'un dessin animé dont le genre, dans l'imaginaire collectif occidental, rime fatalement avec musical. On a donc le droit à une balade pop très sympa lorsque Mila et Eric déambulent dans la cité, interprétée par le duo Vremya i Steklo en VO et Jean-Nicolas Sombrun en VF. Le générique est quant à lui interprété par la formidable Jamala, grande gagnante de l'Eurovision 2016 avec son tube 1944. Des choix efficaces très clairement calibrés pour la vente de single.

Les - :

  • Des personnages (presque tous) problématiques : Le problème majeur du film reste avant tout ses personnages. Eric s'éloigne trop peu des héros habituels et n'a clairement pas l'étoffe d'un Flynn Rider roublard. Mila a curieusement de nombreux traits de caractères communs avec Jasmine (Aladdin) ou Fiona (Shrek) : elle se bat comme personne, rêve d'aventures et de liberté allant jusqu'à fuguer pour cela... C'est toutefois plus inspirant pour les petites filles d'avoir cet archétype en tête plutôt que celui d'une Blanche-Neige ou d'une Belle au Bois Dormant. L'antagoniste principal, Malafar, a le charisme et le physique d'une huître mâchouillée et recrachée aussi sec, ce qui empêche clairement de le prendre au sérieux - surtout que Mila se joue de lui à peine après sa capture... Le trio principal n'est pas des plus intéressants ce qui est dommage car le Maître Chat ou Octave (auteur couard en mal d'inspiration qui rêve de reconnaissance) sont au contraire plutôt bien trouvés.

  • Une ambiance puérile : Toujours liés aux personnages, les sideckicks ! Il n'y en a pas moins de cinq dans le film, six si on compte Malafar qui n'a décidément rien de diabolique. Octave et Eric sont accompagnés d'Houna, une hirondelle débrouillarde (ça pouvait encore passé) mais aussi de Caramel, un hamster rondouillard... Dans les deux cas, ils n'ont clairement pas d'autre utilité que d'être mignons et "drôles" pour les plus jeunes. Il y a aussi le trio de frères aisés dont l'aîné cherche à épouser Mila et suit donc Eric afin de mettre la main sur elle : Edgar, Dimitri et Sasha sont stupides, superflus, fades et les blagues atour d'eux ne fonctionnent clairement pas. Cela ne fait qu'ajouter à l'immaturité du tout et le rend au final peu intéressant à suivre pour les adultes.

  • Des visuels trop proches des grosses productions américaines : Le budget conséquent de Princesse Mila et le sorcier au cœur de pierre est aussi un handicap. Il n'a pas de réelle identité visuelle et se noie dans la masse des dernières productions en image de synthèses. Certains designs et plans rappellent clairement les films de studios majeurs. La chanson Envole-toi est quasiment un plagiat plan par plan de Ce rêve bleu ! Le moment où Eric se saisit de la main de Mila pour la faire monter dans une nacelle par exemple ou encore les oiseaux qui volent autour du couple alors que ce dernier est suspendu dans les airs. A ce stade, autant dire que ce n'est pas du simple hommage... Quant à Mila, elle est typique de l'héroïne qu'on retrouve couramment ces dernières années, tant dans le caractère que dans le design : elle a la robe émeraude et la tignasse flamboyante de Fiona mais le visage et la coiffure d'Anna de La Reine des Neiges, avec les tresses, le petit nez retroussé et les yeux immenses. Le scénario est correct, tout comme la forme mais n'apporte rien de novateur ni de transcendant.

 

Jacob & sa princesse (Карлик нос) - 2003

Résumé : Jacob, fils d'un cordonnier et d'une herboriste, a grandi porté par les idéaux de ses parents : il est juste, serviable et désintéressé, sans histoires.

Sa vie change brutalement le jour où il aide une vieille femme à porter ses courses. Arrivé chez elle, à plusieurs lieux de son village, il s'aperçoit qu'il a affaire à une terrible sorcière... Cette dernière essaie de l'utiliser pour un sortilège mais le cœur pur de Jacob lui permet de déjouer chacune de ses tentatives. Pour se venger, elle lui lance un terrible sort et il parvient in extremis à s'échapper.

De retour chez lui, Jacob découvre que sept ans ont passé et qu'il a l'apparence d'un nain, le dos bossu et le visage défiguré par un nez proéminent. Les villageois se moquent de lui et sa propre mère, brisée par la disparition de son fils et la perte de son mari, ne le reconnaît pas. L'hospitalité et le travail lui sont refusés, il est seul et désemparé...

Malgré ces mésaventures, Jacob est toujours aussi généreux et sauve la vie d'une oie qui s'avère être Greta, la princesse du royaume. Celle-ci a également été enlevée par la sorcière, sept ans plus tôt, et transformée par un mauvais sort.

Tous deux s'unissent alors pour mettre fin aux agissements de la sorcière.

Les + :

  • Une histoire sombre : Ce qui frappe d'emblée avec cette production russe, c'est sans conteste le côté oppressant et tragique de l'intrigue. Les péripéties sont particulièrement sombres, dans des lieux souvent inquiétants. L'ambiance, entre magie et cauchemar, évoque certaines productions Ghibli qui manient à la perfection cet équilibre entre féerie et angoisse. Jacob est rejeté en raison de sa laideur, sujet de toutes les moqueries, accusé de trahison par le roi, menacé d'être exécuté ; au final, il ne peut compter sur personne hormis Greta... Les scènes d'humiliation qu'il endure ne sont pas sans rappeler la dureté d'un autre dessin animé - Le bossu de Notre-Dame. Quant à Greta, son sort n'est guère plus enviable : la sorcière, après l'avoir transformée en oie, ordonne à son faire-valoir de l'emmener au château et de la servir en dîner à son propre père ! L'idée que ces deux âmes perdues se rencontrent sous la forme d'un sortilège (lui en nain, elle en oie) rajoute beaucoup d'intérêt à leur histoire : ils s'apprécient malgré leur apparence peu avantageuse et leur amitié, puis leur inclination, est tout sauf superficielle : chacun arrive à voir au-delà du physique de l'autre. Leur duo fonctionne bien : ils sont jeunes, timides et innocents face à un monde qui ne l'est absolument pas. Leur pureté est un bon compromis face à une ambiance volontairement glauque.

  • Une antagoniste vraiment terrifiante : La sorcière de Jacob & sa princesse est une véritable antagoniste, charismatique et démoniaque. Elle évoque un peu Maléfique, sans tomber dans le plagiat : fumeuse invétérée, très maigre, les traits anguleux, les dents pointues, le corps décharné caché sous une longue cape... Elle a tout d'une succube ! Ses facultés de métamorphose, sa fourberie et sa cruauté font d'elle une méchante de choix - elle va même jusqu'à torturer son faire-valoir, Urban, qui est pourtant un membre de sa famille. Sa présence et son aura démoniaque planent sur l'ensemble du film. Le personnage n'est jamais ridiculisé et sa méchanceté n'est pas minimisée par crainte d'effrayer les enfants, c'est même tout le contraire : elle est clairement créé dans l'idée de faire peur !

  • Une animation soignée à l'ancienne : Les graphismes, très recherchés, évoquent ceux d'une ancienne production façon Disney. Le film est un véritable bijou à découvrir, surtout pour les nostalgiques qui regrettent l'époque de l'animation traditionnelle. Certaines scènes sont très poétiques, en dépit d'un budget peu considérable, comme la danse au clair de lune. Si l'animation n'est pas exempte de défauts, elle possède un vrai cachet, un certain lyrisme qui sied parfaitement à l'esprit du film. Les héros ont également des visages qui leur sont propres et ne ressemblent pas à ceux d'autres dessins animés. A titre personnel, l'animation, peu onéreuse mais visiblement faite par des passionnés, m'a rappelée le film hongrois La princesse et la forêt magique. Le charme désuet fait d'emblée son oeuvre et marche d'autant plus pour ce conte méconnu écrit par Wilhelm Hauff au XIXème siècle.

Les - :

  • Un dénouement trop rapide : Contrairement à Princesse Mila & le sorcier au cœur de pierre, le dénouement est hélas beaucoup trop simpliste et rapide. La sorcière aurait pourtant méritée un affrontement ultime digne de ce nom face à Jacob et Greta... La conclusion entourant son acolyte Urban est également peu inspirée. C'est d'autant plus regrettable que l'intrigue met déjà du temps à se mettre en place, à présenter les personnages et à enclencher les péripéties, elle aurait donc pu s’octroyer davantage de rebondissements... La fin donne un sentiment de bâclé comme si, brusquement, le studio n'avait pas eu les moyens de finir dignement son histoire.

  • Une musique inexistante : Autre point négatif, la bande originale signée Valentin Vasenkov, totalement insipide ! Curieusement peu inspirée, elle ne souligne ni la force de l'histoire, ni la beauté des décors. Le film ne comporte quasiment aucune séance chantée mais, comme il en fallait au moins une (rappelez-vous de l'importance des chansons dans les dessins animés d'un point de vue occidental), il a été décidé qu'elle surviendrait lors de la danse entre Greta et Jacob. Ce duo est une catastrophe en tout point : la justesse des chanteurs est plus qu'approximative, les paroles d'une mièvrerie sans borne - du moins dans l'adaptation française... Elle casse la poésie d'un très beau moment et on en vient à regretter la partition désincarnée de Vasenkov.

 

Conclusion :

Vous l'aurez sans doute compris à la lecture du match ci-dessus mais les deux films se distinguent clairement par leur parti pris respectif : l'un se veut contemporain et drôle, dans l'air du temps mais est curieusement déjà daté ; l'autre joue la carte du classique et bénéficie d'une ambiance mystérieuse qui lui est propre, ce qui le rend bien plus indémodable...

En dépit de ses aventures rythmées, l'immaturité, le plagiat outrageux d'autres grosses productions et le manque criant de singularité font de Princesse Mila & le sorcier au cœur de pierre un film au mieux correct, au pire anecdotique. C'est toutefois parfait pour occuper les gosses sans prise de tête, lorsque le temps est maussade et les sorties limitées - d'où le fait qu'il ait été diffusé en avant-première sur Gulli, car il correspond parfaitement aux critères de sélection de la chaîne.

A l'inverse, Jacob & sa princesse est une belle surprise : l'histoire sur fond de magie, l'ambiance à la fois poétique et inquiétante qui se rapproche des productions Ghibli, les graphismes en deux dimensions, la jolie morale... Le film, qui a fait le tour des festivals, a bien sûr des défauts mais reste très appréciable dans son ensemble. Surtout, il véhicule une aura très particulière qui le rend intéressant pour les enfants plus matures et les parents.

Je vous suggère donc, pour un après-midi en famille, d'opter pour cette production russe qui assure un moment aussi sympathique que singulier.

 

Pour se les procurer c'est ici ➡️

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