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Au-delà des limbes #En 3 points

Titre : Au-delà des limbes

Auteur : Mélanie Baranger

Éditeur : Plume Blanche

Genre : Fantastique, drame, romance

Date de parution : 2016

Résumé de l'éditeur : On ne prévoit jamais la date de sa mort. On peut y penser, souvent, on peut en avoir peur, parfois, mais personne ne sait quand elle viendra nous chercher. Ambre, une jeune étudiante de 21 ans, plonge dans un long coma à la suite d'un terrible accident, mais ce qu'elle découvre alors va changer sa vie à jamais. La Mort n'est pas une fin...

Note : 4/5

#En 3 points :​


« Je m’appelle Ambre Thomas. J’ai vingt et un ans. Je vais mourir et mon histoire commence ici. »

~ P 12


*Fantôme ou âme ? : Imaginez, un terrible accident, une douleur atroce… Un réveil entre la vie et la mort : Ambre se retrouve dans les limbes, sorte de monde parallèle invisible pour la majeure partie des vivants. Elle est une âme, une entité toujours reliée à son enveloppe charnelle plongée dans le coma. Elle peut se déplacer dans le centre hospitalier, voit tout ce qui s’y passe, suivre les allers-retours de sa mère, sa sœur, ses amis, sans pouvoir intervenir directement. La jeune femme n’a d’autre choix que d’attendre son réveil ou son trépas. Heureusement, pour lui tenir compagnie et atténuer son angoisse, une bande de fantômes ainsi que deux autres âmes, également victimes des attentats et plongées dans le coma : Jérôme et Maïssa.

Le postulat de base est fascinant : avec beaucoup de minutie et de talent, Mélanie Baranger nous relate le quotidien d’Ambre, des autres âmes et des fantômes. La nuance entre ces deux termes est réellement intéressante et bien trouvée : les premiers sont coincés et dépendent de l’amélioration de leur état corporel pour quitter les limbes ; les seconds restent sciemment sous cette forme spectrale afin d’accomplir une mission qui leur est chère – protéger un proche, apaiser les siens, attendre le dénouement d’une situation complexe…

Dès les premières pages, la nouvelle s’annonce comme éprouvante : la scène des attentats s’avère particulièrement violente, la description de chaos (panique, souffrance, peur) qui s’en suit est atrocement réaliste… Elle évoque crûment les évènements qui ont touchés la France et la Belgique au cours de ces dernières années et dont les images restent gravées dans la rétine.

Mais lorsque le monde imaginaire prendre place dans l’histoire, très vite, il semble évident que l’on ne sera pas plus épargné : le parcours des fantômes, l’issue tragique qui a mené à leur décès sont révélés au fur et à mesure.

L’intrigue pourrait facilement tomber dans le pathos mais il n’en est rien : en très peu de pages, l’auteure décrit des personnages forts et touchants, dont les existences restent profondément crédibles et ancrées dans le réel. Chacun a sa croix à porter et, dès lors, essaie d’apaiser son chagrin comme il le peut, notamment en rendant visite à son entourage. Surtout, ces scènes ne sont jamais gratuites : elles permettent de faire avancer la trame ou de nous éclairer sur le fonctionnement des limbes, ainsi que sur la différence fondamentale entre le statut de fantôme et celui d’âme. Tout comme Ambre, le lecteur est fasciné et touché par ces fantômes et le dénouement tragique qu’ils ont connu… Tous sont attachants, à commencer par Flora et Nour ; Mélissa est également une protagoniste très intéressante, réfléchie, en apparence détachée mais pourtant généreuse, qui endosse la dure responsabilité de guide pour les âmes et les fantômes.


« Nous avons vu le Soleil se coucher, puis se lever. C’est vraiment étrange de ne pas avoir à dormir, à manger ou à réaliser toutes autres activités dites normales : prendre une douche, se brosser les dents, se peigner… Aucun manque, aucune envie de faire ces choses. C’est déstabilisant aussi, car, au final, les journées ne sont plus rythmées par ce quotidien. »

~ p 32-33


*Une histoire dans l'air du temps : Vous l’aurez certainement compris mais, de part ses thématiques, Au-delà des limbes s’inscrit particulièrement dans notre époque. On y évoque l’homicide involontaire ou non, l’adoption, la culpabilité, les SDF, les dangers du fanatisme, la pression familiale, les unions arrangées, la difficulté d’être un parent célibataire… Les personnages de Mélanie Baranger sont également une ode à la diversité car tous viennent de milieux sociaux variés, ont des couleurs de peau différentes, n’ont pas la même culture, la même foi ou le même âge. Il n’empêche que notre bande ectoplasmique reste soudée et témoigne à maintes reprises de l’amour et du respect qu’ils se témoignent les uns envers les autres.

Ambre elle-même est une héroïne sympathique et la narratrice idéale : elle est idéaliste, joyeuse, optimiste, vient d’une banlieue (qu’elle ne renie absolument pas) et fréquente des gens différents… Ses rapports avec sa mère, sa cadette Vic ou ses amis sont épanouissants, basés sur la confiance et l’amour. C’est surtout sa relation avec Vic qui est unique et profonde, car les deux sœurs évoluent ensemble au prix de cette terrible aventure. Elle aurait tout d’une Mary Sue si elle ne se montrait pas à plusieurs reprises blessée ou angoissée, et qu’elle ne reportait pas notamment son incompréhension et sa colère sur Mélissa. Son caractère positif ne l’empêche pas de ressentir de la peine ou de la rage, de réagir violemment via la situation délicate où elle se trouve. Ambre reste ainsi profondément humaine et il est facile de s’identifier à elle. Ce qui lui manque le plus dans cet état d’âme, c’est justement de ne plus sentir tout ce qui lui rappelle son existence humaine : la chaleur du soleil, la faim, la soif, les larmes, les caresses, les étreintes charnelles…

Même lorsque l’on est peu sensible au romantisme, l’amour d’Ambre et Jérôme, si prévisible soit-il, est totalement convaincant, de même que leur volonté de se retrouver, justement, au-delà des limbes : ils ont tous les deux subi un attentat, végètent en tant qu’âme dans l’attente d’un potentiel réveil, se témoignent de l’attention et du soutien… Surtout, l’absence de sommeil leur permet de passer plusieurs jours consécutifs ensemble, quasiment 24h sur 24, et donc de se rapprocher, de tout savoir l’un de l’autre : on est très loin du coup de foudre, sempiternel (et désastreux !) raccourci scénaristique visant à justifier une attirance dans des situations qui ne s’y prêtent pas. La scène qui évoque le désir est également très belle, déchirante et emplie de sensualité.


« Je pense à toutes ces familles, à tous ces blessés, à tous ces morts… Qu’est-ce qui vaut tant de sacrifices ? Encore un acte de haine, réalisé par des fanatiques endoctrinés pour un idéal idiot. »

~ P 18-19


*Ghost in the Hopital : Au-delà des limbes est une courte nouvelle implacable mais touchante, qui se dévore d’une traite. Elle évoque, à différentes échelles, des thèmes primordiaux, le tout dans un univers fantastique concluant, cohérent et original. Ajoutez à cela une touche de romance, une pointe d’humour et une plume fluide agrémentée de répliques marquantes, et vous tenez là une réussite.

Le dénouement, qui ne tombe ni dans le happy-end forcé ni dans la tragédie facile, est parfait et offre une issue satisfaisante pour chaque personnage : sans utopisme, cette conclusion reste vraiment convaincante et clôt à merveille l’intrigue !

On peut également apprécier le fait que l’auteure ne nous impose pas sa vision d’un éventuel paradis : ce qu’il se passe après le séjour dans les limbes relève de l’imagination des lecteurs. Éden, néant, vie alternative, réincarnation ? A vous de choisir, le thème ici est tout autre : l’intrigue est bel et bien une réflexion sur le temps qu’il nous reste avant notre départ et ce que nous souhaitons en faire. C’est également une incitation à profiter de la vie, si brève et injuste puisse-t-elle sembler aux vivants.

Au final, la nouvelle s’inscrit dans les histoires de fantôme aussi romanesques que réussies, à l’instar de Deux cierges pour le Diable, Ghost ou Den Osynlige.

Un Prix de l'Humanisme remporté en 2016 largement mérité pour Mélanie Baranger dont le fantastique est, sans conteste, le domaine de prédilection.


« À quoi pensent les gens lorsqu’ils viennent nous voir ? Viennent-ils à reculons ? Avec la peur de nous voir, placides, immobiles, portant le masque de la mort sur le visage ? »

~ p 85-86

« Il se prépare à narrer son histoire. Nous lui vouons tous une attention particulière, bien que les autres aient déjà dû l’entendre. Je pense que c’est une sorte de rituel. Chacun s’écoute et se respecte, car ils ont conscience de l’importance de ne pas oublier, de se remémorer. »

~ p 30

« J’ai toute ma vie devant moi. Elles, n’ont plus que l’infini. »

~ p 136

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