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L’avis des libraires - 73ème chronique : Les beignets d'Oscar ou mes 100 jours de bonheur

L’avis des libraires - 73ème chronique :

Les beignets d'Oscar ou mes 100 jours de bonheur de Frausto Brizzio

Se réinventer, s'interroger & aimer au goût des ciambelle !

La vie de Lucio s’effondre lorsqu’il apprend qu’il est atteint d’un cancer en phase terminale : il ne lui reste que 100 jours et des poussières. Quitte à profiter au maximum de ces quelques mois, il décide de changer radicalement de vie et d’accomplir les objectifs qu’il s’est fixé. Priorité : se faire pardonner de sa femme Lucia après une liaison adultère. Il va pouvoir compter sur le soutien inébranlable de ses deux meilleurs amis, ses enfants ainsi que son beau-père pâtissier Oscar et ses fameux beignets…


Règle n°1 du lecteur : ne jamais juger un livre à sa couverture. Je vous dois une petite confession : j’ai craqué pour la couverture des Beignets d’Oscar, réalisée par l’incroyable Anne-Lise Dugat – la Cake Designer à l’origine des visuels des romans gourmands de Cathy Cassidy. Je n’ai même pas lu le résumé avant de me plonger entre ses pages. Sur la forme donc, le roman est à croquer. Qu’en est-il du fond ? Identique !

J’ai dévoré ce livre, je l’ai adoré jusqu’à la dernière miette ! Les beignets d’Oscar compte parmi les meilleures découvertes, celles qui, sans crier gare, s’achèvent par un coup de foudre inconditionnel du lecteur. Le thème, pourtant, n’a rien de spécialement joyeux ni original – un cancer en phase terminale, une mort imminente, une séparation avec les proches… Pourtant, Fausto Brizzi innove constamment et met un point d’honneur à nous désarçonner dès les premières pages : le narrateur, Lucio, fraîchement décédé, nous raconte, avec un talent inné de la dédramatisation, ces 100 jours restants qui « contre toute attente et toute logique, […] ont été les plus heureux de [sa] vie ».


« La spécialité de la maison était et est encore la ciambella, le beignet au sucre. Parfumé, moelleux, avec cette saveur d'enfance. C'est une tradition qui se perpétue depuis plus de trente ans. Oscar, le père de Paola, ouvre à demi le rideau métallique dès 2 heures du matin pour que les zonards et les oiseaux de nuit du Trastevere puissent se jeter sur les beignets encore chauds et huileux. »

~ p 21


Et comment ne pas s’attacher à Lucio ? Ex-athlète incollable sur les illustres inventeurs (Léonard De Vinci en tête), grand amateur de beignets, papa attentionné, compagnon gouailleur, mari prêt à tout pour reconquérir sa femme… Il manie avec talent la répartie et l’ironie, combat, lutte des façons les plus inattendues face à cette maladie qui le ronge pourtant de l’intérieur. Son cancer, il le baptisera d’ailleurs l’ami Fritz, pour « le rendre plus familier et moins agressif ». Lucio – qui se définit pourtant comme un sempiternel perdant - il est l’un des plus grands protagonistes qu’il m’ait été donné de lire ; un homme ordinaire qui, alors que le temps lui est compté, va accomplir l’extraordinaire : améliorer son quotidien mais surtout celui de ses proches.

Signe d’un grand roman, tous les personnages qui gravitent autour de Lucio sont attachants : ses enfants Eva et Lorenzo ; ses meilleurs amis Umberto et Corrado avec lesquels, éternels adolescents, s’accomplissent les quatre-cent coups ; sa femme Paola, fière, digne, rancunière, et pourtant aimante et dévouée ; son beau-père facétieux Oscar, pâtissier prodige et grand amateur de théories vaseuses ; son libraire Roberto, écrivain à ses heures perdues ; son confident Massimiliano qui tient un magasin de bavardage ; Giacomo, son adjoint simplet zélé ; son dernier ami en date, Giannandrea, dépressif chronique ; l’ensemble des gamins qu’il entraîne au water-polo… Tous sont géniaux, dotés d’une personnalité originale et forte. Le trio Lucio/Umberto/Corrado, auto surnommé les Trois Mousquetaires, est excellent. Il en va de même du couple formé par Paola et Lucio, complexe, réaliste et touchant.


« J'appelle Umberto et Corrado et nous organisons une super pasta-partie comme au bon vieux temps. Un kilo de spaghettis carbonara à trois. Oui, je sais que cela contient de la farine blanche, des œufs cuits et plein d'autres poisons. Mais nous ne pouvons y résister. Les pâtes à la carbonara, c'est comme une ancienne maîtresse qu'il est agréable de retrouver de temps en temps. C'est agréable avant, pendant et après, parce que la digestion de cette mixture complexe embrume le cerveau et enivre comme le cannabis. »

~ p 150


Bien que profondément positif, le livre surprend par des moments d’une singulière émotion, et ce bien que le dénouement soit couru d’avance. Leur rareté, sans effet tire-larme, les rend d’autant plus touchants !

Les beignets d’Oscar est en plus doté d’un esprit qui lui est propre, véritable hommage au bel paese : une multitude de références enrichissent l’ouvrage, qu’ils s’agissent d’auteurs, de monuments, de spécialités culinaires, de films ou de musiques ! L’ambiance romaine, à nulle autre pareille, semble imprégner chaque description, de même que la gastronomie italienne, omniprésente…

D’un sujet dramatique, Brizzi tire un roman drôle, touchant, magnifiquement bien écrit et feel-good… A l’image d’un beignet d’Oscar, le style est craquant, l’intrigue tendre à souhait, le tout d’une douceur sucrée qui ne dégouline jamais de bons sentiments. Un chef-d’œuvre et un coup de cœur..


« Je la connais par cœur maintenant et ne l'en aime pas moins. Comme les passionnés de Dante qui, après avoir lu plusieurs fois La Divine Comédie, en apprécient encore plus profondément la poésie.Paola est ma Divine Comédie. »

~ p 181

« Les grands-parents sont comme les super-héros. Ils ne devraient jamais mourir. »

~ p 24

« Un pâtissier ne peut pas être maigre, sinon les clients pensent qu'il est mauvais. »

~ p 137 (Oscar)

Fausto Brizzi : Les beignets d’Oscar ou mes 100 jours de bonheur chez Fleuve Éditions. 398 pages. 19,90 €.

Disponible également en format poche sous le titre Mes 100 jours de bonheur aux Editions Pocket. 464 pages. 7,80 €.


Article paru dans le Pays Briard le 27.03.18

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