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  • Photo du rédacteurChloé

Cin’express : Mars / Avril / Mai 2020

🎥 Cin’express : 🎥

Mars / Avril / Mai 2020

Eh bien voilà ! Après trois mois, nous allons pouvoir reprendre le chemin des salles obscures ! Oui oui, #oniratousaucinema ça se joue maintenant - les cinémas ont besoin de vous, les productions audiovisuelles aussi, alors on se motive et on retourne acheter sa place. Même si la programmation n'est pas des plus alléchantes. Bref.

Pour ma part, j'avoue que ces dernières semaines auront été marquées par un manque total d’appétence niveau culturel, qu'il s'agisse de films, musique ou lectures.

A deux exceptions : une série (un petit bijou Netflix dont je vous parlerais sans doute très bientôt) et un film que vous retrouverez ci-dessous, véritable coup de cœur !

Cela dit, comme vous allez très vite le constater, mes (rares) visionnages n'ont pas été des plus glorieux. A un contre-exemple près, je vous propose donc des chroniques remplies de haine, d'incompréhension et de ressentiments. Allons-y !

 

🎬 Forte : 1/5 (exclusivité Amazon Prime)

Chaque année, il y a au minimum une purge française insultante et malaisante qui s'attire les foudres des cinéphiles. Cette année, les producteurs ont mis la barre très très haut avec Forte !

A priori, le pitch nous vend du body positive, de la comédie feel-good, légère et sans prise de tête : Nour, une jeune femme complexée par son poids, se lance dans la pole dance avec l'aide de ses acolytes et de sa coach. Un moyen de s'accepter enfin sans rentrer dans les cases ? De se sentir mieux dans son corps, de reconquérir son pouvoir de séduction ? De se rendre compte qu'une femme peut exercer n'importe quel art quel que soit son physique ? De mettre en avant l'importance de la sororité ? Point du tout mais la volonté de séduire un homme qui admire ces danseuses et dont elle-même s'est entichée !

Le postulat est bancal et la suite, hélas, s'enlise dans une succession de scènes toutes plus douteuses les unes que les autres : punchlines débiles, pudibonderie des corps (un comble vu le sujet), succession de stéréotypes, viol dé-diabolisé, pole dance décrédibilisé, traitement de la sexualité problématique, dénigrement de la monoparentalité, rythme chaotique, personnages peu crédibles, faussement positif, absence de point de vue, idiot de bout en bout, misogynie déguisée, acteurs mal dirigés...

Spoiler : le pire nous est offert par le dénouement où Nour ne s'affirme finalement pas par elle-même et renonce à faire le show... Puisqu'elle s'accepte par les yeux de son intérêt amoureux, protagoniste creux à peine entrevu ! Un comble pour un film produit, scénarisé et mis en scène par la gente féminine. Restent quelques seconds rôles corrects qui ne sauvent pas pareil fiasco.

Un mystère demeure encore : l'extrême indulgence de la presse et d'une part non négligeable des spectateurs à son égard. Comme si la dimension "comique" atténuait le nauséabond du message et le traitement infect réservé aux femmes au fil de l'intrigue... Ou pire, qu'elle la masquait, limitant les défauts du film à une cible comédie pataude, clichée et lourdingue mais inoffensive. Et au fond, c'est bien là tout le problème : le long-métrage est dangereux parce qu'il cautionne la misogynie et ses déviances par le prisme de l'humour, qu'il banalise des propos néfastes et qu'il le fait d'une façon détournée, insidieuse.

Bref, l'héroïne n'était pas prête à cette débâcle... Et nous non plus !

 

🎬 Call Boy : 1,5/5

Prenez un roman. Mieux : prenez un excellent roman. Découvrez une trame qui mêle sexualité, psychologie et sociologie, le tout avec une sensualité pudique et une plume à la finesse désarmante. Succombez aux charmes de personnages atypiques et torturés. Accédez à leurs états d'âme et à leurs pulsions les plus intimes par un regard dépourvu de tout jugement. Vous avez entre les mains un chef-d'oeuvre, à savoir Call-Boy de Ira Ishida.

A présent, penchez vous sur le film qui en a été tiré. Après une introduction prometteuse et quelques scènes inspirées, hallucinez face au fiasco. Assistez à la mutation de l'histoire originale en un scénario dépourvu de toute profondeur et amputé de toute empathie. Voyez des acteurs sublimes mais filmés avec autant de subtilité qu'un mauvais porno. Subissez l'éclairage au néon, les scènes crues qui s'enchaînent jusqu'à la nausée, le trash montré complaisamment. Vous avez sous les yeux une adaptation insultante, à savoir Call-Boy de Daisuke Miura. On retiendra de cette débâcle le trio principal (Tori Matsuzaka, Sei Matobu et Ami Tomite), lequel parvient à rattraper in extremis la vision racoleuse proposée par le réalisateur. Trois comédiens qui ne méritaient pas un tel navet dans leur filmographie...

 

Emma. : 4,5/5

De toutes les figures féminines inventées par Jane Austen, Emma Woodhouse est sans doute l'une des plus complexes.

Décrite dès l'incipit comme « belle, intelligente et riche », l'héroïne éponyme se révèle passionnante et mordante, amie ambitieuse et fille dévouée. Si elle possède de nombreuses qualités, la ravissante héritière peut aussi se montrer condescendante, snob... Voire carrément odieuse ! Emma offre donc un portrait dépourvu de manichéisme, une image nettement moins sage de la jeune fille évoluant dans l'ère géorgienne - elle est en ce sens bien plus difficile à incarner sur grand écran que l'indétrônable Elizabeth Bennet.

En effet, soit Emma est limitée à l'archétype de la garce détestable, soit son caractère est adouci au point de lui ôter toute profondeur. L'équilibre est précaire et nombreuses sont les productions à avoir mal cerné la personnalité complexe de Miss Woodhouse, diabolisée ou lissée à l'excès. Emma l'entremetteuse, avec Gwyneth Paltrow en tête d'affiche, en est l'exemple le plus probant : le personnage ne véhicule rien d'autre que de l'antipathie et du dédain, échouant à être attachante aux yeux des spectateurs.

Mais qu'en est-il de cette vision 2020 ?

Disons-le sans mondanité ni fioriture : Emma. est une belle et grande réussite. L'une des meilleures adaptations de Jane Austen à ce jour, l'un des projets les plus inspirés, les plus aboutis ayant trait à la romancière.

L'équipe à qui l'on doit ce succès est composée de la photographe Autumn de Wilde à la réalisation, Eleanor Catton au scénario, Isobel Waller-Bridge à la composition, Alexandra Byrne aux costumes, Kave Quinn aux décors... Et peut-être est-ce pour cela, au fond, que l'oeuvre se démarque tant des précédentes adaptations. Toutes ces artistes ont su brillamment interpréter le texte d'une autre femme, sans craindre d'y insuffler une aura contemporaine : elles ont compris qu'Emma est un personnage indémodable, auquel les spectatrices s'identifient d'autant plus qu'elle est imparfaite, souvent dans l'erreur, parfois blessante mais toujours extrêmement bien écrite. De Wilde, Catton, Waller-Bridge, Byrne, Quinn... Toutes véhiculent ce "female gaze", un œil féminin acéré, tour à tour complice, compatissant et critique qui se ressent à chaque instant du long-métrage ! La vision de la femme - des femmes - est magnifiée dans Emma.

D'une façon générale, l'adjectif idéal pour le film serait d'ailleurs celui-ci : magnifique. Beauté de la langue, des interprètes, des domaines, des paysages bucoliques, des costumes, des cadres, de la musique... Via l'objectif d'Autumn de Wilde, tout est certes charmant mais sans fadeur, peinture fantasmée d'une bonne société champêtre parée de couleurs poudrées, dont la rutilance ne cache ni les défauts des personnages ni la pression sociale.

Tout en étant d'une fidélité remarquable au niveau des dialogues, ciselés et doux-amers dans le pur style austenien, le film tire toute sa modernité de la mise en scène inspirée, des situations décalées et expressions des acteurs.

L'ironie est de mise sous les projecteurs, où l'on se moque allègrement de la bonne société britannique d'antan. On notera ainsi la façon dont la réalisatrice filme le personnel ; l'attitude flegmatique des valets, omniprésents, discrets et vaguement hautains, mérite largement le coup d’œil... Une pointe de cynisme bien placée qu'on ne se lasse pas d'apprécier !

Avec un peu de recul et beaucoup de panache, la version 2020 fait souffler un vent de fraîcheur sur cette histoire deux fois centenaire et sur les films en costumes d'une façon générale.

De fait, la réussite incontestée du long-métrage n'est pas sans rapport avec sa distribution : le casting est idéal, des rôles principaux aux acteurs de soutien.

Anya Taylor-Joy excelle en Emma, imposant son charme atypique et sa prestance sur près de deux heures. Elle est d'ailleurs sublimée par une trentaine de toilettes différentes, toutes plus merveilleuses les unes que les autres - la costumière Alexandra Byrne offre un vibrant hommage au style vestimentaire de l'époque, contrasté par des choix audacieux, un sans-faute esthétique et un ravissement pour les yeux ! Outre ces atours, la comédienne révélée par The Witch s'avère tour à tour charismatique, charmante, venimeuse, naïve mais, surtout, de bout en bout, parfaitement crédible en jeune héritière gâtée en manque de discernement. Son tandem avec Johnny Flynn fonctionne au-delà des espérances : il y a une véritable alchimie au sein du couple principal, on croit à leurs échanges, à leur amitié, à l'esquisse de leurs sentiments, à leurs désaccords, à l'inclination mutuelle qu'ils s'évertuent à nier.

A ce sujet, Flynn est de loin le George Knightley le plus séduisant du petit et du grand écran. S'il véhicule la gentillesse et le sens du devoir propres au personnage, il s'avère nettement moins fade que ses précédentes incarnations. Dès sa première apparition, il est montré par le prisme du désir, de la tentation. Gentleman sauvage et déterminé, impertinent et malin, il va plusieurs fois à l'encontre de certaines normes sociales. Son caractère bien trempé lui permet de rivaliser avec Emma dans toutes les joutes verbales, il fait souvent office de guide moral sans tomber dans le paternalisme. Un dandy à la virilité angélique qui tient du gentil Démon, parfait donc pour s'opposer à l'enfant de cœur un tantinet diabolique qu'est notre héroïne. Tout comme Taylor-Joy, Flynn arrive très bien à jouer sur le comique d'interprétation, ses gestes, ses expressions, son attitude... En résulte un couple parfaitement assorti et beaucoup moins mièvre que ce que l'on pouvait craindre.

Dans les rôles secondaires, on soulignera les performances de Mia Goth en Harriet, adorable sans être anecdotique ; Miranda Hart en Miss Bates, laquelle parvient à rendre un personnage insupportable sincèrement touchant ; et enfin Bill Nighy en patriarche protecteur, cynique et décalé - archétype qu'il manie décidément à la perfection.

Difficile de trouver un point négatif à cette transposition, qui brille décidément sur tous les tableaux. Pour sa première excursion au cinéma, Autumn de Wilde surpasse toutes les attentes, nous délivrant une oeuvre séduisante, cocasse et maîtrisée de bout en bout. A l'image de son héroïne, Emma. est une adaptation audacieuse, brillante et riche. Du grand art, au sens le plus littéraire du terme.

 

🎬 Ducobu 3 : 1,5/5

Après un premier film correct et une suite à la qualité plus que contestable, la franchise Ducobu revient pour un troisième opus. Et c'est sans grande surprise que le déclin du cancre se poursuit inexorablement.

Le casting subit lui aussi les affres de cette débâcle : Joséphine de Meaux, Helena Noguerra et Juliette Chappey, après avoir vaillamment campé leurs rôles durant deux longs-métrages, ont décidé d'arrêter les frais, trop talentueuses pour les rôles qui leur étaient proposés. De toute façon, Bruno Podalydès et Vincent Claude, à savoir Ducobu père et fils, avaient déjà eu la bonne idée d'arrêter à la fin du premier volet - ils avaient été remplacé (sans inspiration) par le tandem PEF/François Viette, lequel a donc aussi jeté l'éponge entretemps.

De la saga ne reste donc qu'Elie Semoun en Latouche. Ce dernier avait déjà tendance à voler la vedette au célèbre cancre à pull rayé mais pour ce nouveau projet, il s'approprie en plus la casquette de réalisateur. Autant dire que du Latouche sauce Semoun, vous allez en avoir à toutes les sauces et sous tous les angles pendant 1h30, ce dernier multipliant les rôles et les travestissements - de là à l'accuser d'ego mal placé, il n'y a qu'un pas !

Pour le reste, la réalisation est au niveau d'un mauvais téléfilm, l'humour est ringard et la trame tient sur une antisèche. Quant aux tentatives désespérées du scénario pour être dans le coup et appâter un public enfant/pré-ado, elles sont plus gênantes qu'autre chose - l'idée du télé-crochet, la présence de Norman, Maître Gims à la BO...

L'histoire ne se donne même pas la peine d'être cohérente avec le reste de l'univers, ce qui donne bien une idée du niveau du je-m'en-foutiste total entourant le projet. Les personnages, enfin, ne sont plus que l'ombre de ceux chers à Godi et Zidrou. Que dire du relooking forcé de Mme Gratin et Mr Ducobu qui se comportent brusquement comme des lycéens attardés ou de Léonie qui fait des garçons l'un de ses centres d'intérêts majeurs, au détriment de sa scolarité ?

Voilà la preuve, une fois encore, que les francophones sont bien en peine d'adapter convenablement leurs BDs cultes à l'écran. Innocent, certes mais oubliable et agaçant. Au coin !

Skam a tout compris, comme d'habitude !

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