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Quand Oliver Parker adapte Oscar Wilde...

Quand Oliver Parker adapte Oscar Wilde...

🎥 Un mari idéal ⭐ avec Jeremy Northam, Minnie Driver, Rupert Everett 🗓 Sortie : 15 décembre 1999

Oliver Parker est un admirateur inconditionnel d’Oscar Wilde… Il l’a prouvé à plusieurs reprises, en adaptant notamment avec succès L’importance d’être constant (en 2002) et une version – moins fidèle – de son roman mondialement connu, Dorian Gray, sept ans plus tard. Mais son premier essai de s’adonner à l’univers de Wilde eut lieu en 1999, avec Un mari idéal. Première tentative et victoire indéniable : la transposition à l’écran de la pièce du célèbre dandy atteint (presque) la perfection. L’adaptation d’une œuvre théâtrale de Wilde par Parker ne pouvait donner lieu qu’à un film drôle, pertinent mais aussi cynique et férocement critique envers la société. Un discours, qui curieusement, semble plus que jamais d’actualité lorsqu’il traite par exemple de la corruption politique et des capacités de l’Homme à écraser les autres pour pouvoir s’élever, par enjeu ou ennui… Et pourtant, il salue davantage le mensonge – ici salvateur – que la vérité qui menace de tout anéantir. Dans sa volonté de respecter la pièce de Wilde, Parker signe une mise en scène soignée et énergique mais sur laquelle il n’appose pas encore réellement sa marque. Qu’importe, il prouve ici qu’il n’est pas seulement un bon réalisateur – l’excellence viendra plus tard – mais avant tout un porte-parole des discours rebelles et éclairés qui étaient si chers à Wilde. Dans des décors somptueux de la haute société Londonienne, la richesse des costumes et la musique de Charlie Mole apportent un souffle de modernité esthétique rafraichissant. L’ensemble est un parfait équilibre qui accompagne le burlesque des situations et les personnalités plus ou moins troubles des personnages… Pourtant, en premier lieu, on retiendra surtout la prestation exceptionnelle de Rupert Everett en décadent et misanthrope Lord Goring : entre les gestes sophistiqués, le charme faussement désinvolte et le caractère flegmatique, il semble tellement à l’aise dans l’interprétation de son personnage que le rôle lui semblait destiné depuis toujours. Le duo vénéneux qu’il forme avec la belle Julianne Moore sur fond d’intrigues politiques et de situations amoureuses sonne si juste qu’il en évincerait presque les autres acteurs, pourtant impeccables. Pour le reste, en dépit de quelques longueurs, les répliques élevées et la qualité du casting combinées au talent d’Oliver Parker, font du film une comédie certes distrayante mais empreinte d’une grande profondeur. Sans nul doute l’une des meilleures adaptations dont Oscar Wilde et ses admirateurs pouvaient espérer.

 

🎥 L’Importance d’être Constant ⭐ avec Rupert Everett, Colin Firth, Reese Witherspoon, Frances O'Connor 🗓 Sortie : 30 avril 2003

L’Importance d’être Constant est sûrement la pièce la plus burlesque et la plus drôle d’Oscar Wilde : elle enchaîne quiproquos délirants au possible, histoires de famille complexes et relations amoureuses cocasses. Et pour un tel chef d’œuvre, quelle joie de retrouver, après le très réussi Mari Idéal, le duo Oliver Parker/Rupert Everett ! Pour sa seconde rencontre avec Wilde, Parker renoue avec cet univers délicieusement satyrique et libertin avec plus d’assurance. Si l’on ressent son style, encore trop tâtonnant par moment, il confirmera davantage sa liberté dans la mise en scène avec l’excentrique St-Trinian ou le mystérieux à tendance gothique Dorian Gray. Afin de restituer l’atmosphère si particulière de l’Importance d’être Constant à l’écran, Parker retrouve son compositeur attitré, Charlie Mole, lui aussi visiblement plus libre puisqu’il se permet d’instaurer quelques notes jazzy à ses morceaux, en total décalage avec la période historique où se déroule la pièce, histoire d’ajouter au côté burlesque. La reconstitution d’un Londres aux rues glaciales, aux cabarets animés et délicieusement libertins, aux salons précieux surchargés, est très bien rendue. En portant son choix sur West Wycombe Park pour recréer la spacieuse maison campagnarde de Jack, aucun doute que Parker avait réfléchit aux possibilités que représentait ce vaste terrain verdoyant sillonné de lac et de rivières : West Wycombe devient ainsi un personnage à part entière, où chaque lieu est associé à une scène précise… Nous nous attarderons davantage sur le casting cinq étoiles réuni : le film parvient l’exploit difficile de surpasser celui d’un Mari Idéal. Outre le plaisir de retrouver Rupert Everett dans un rôle sur mesure, Colin Firth s’invite également en tête d’affiche : pour interpréter le tandem Algy/Jack, difficile de rêver mieux. Leurs talents combinés promettent des moments de franches rigolades et leur complicité est palpable dès les premières minutes où ils entrent en scène, provocants, manipulateurs et décadents à souhait… Comme avec ce duo chanté énamouré, « Lady come done », sur lequel ils s’en donnent à cœur joie sans craindre le ridicule – ils réitéreront d’ailleurs l’expérience cinq ans plus tard avec « Love is in the air », toujours sous la direction de Parker, dans St-Trinian. Côté actrices, le rôle de la glaciale Lady Bracknell, femme de fer aux idées plutôt bien arrêtées, est tenu par une Judi Dench toujours aussi impeccable. En fiancée de Colin Firth et fille infortunée de Lady Bracknell, la trop rare Frances O’Connor dresse le portrait d’une jeune femme en pleine crise de rébellion (tatouage et vol/emprunt de voiture à l’appui !). Mais la véritable révélation féminine du film, c’est bel et bien Reese Witherspoon, en rêveuse passionnée. C’était à l’heure où elle peinait à se faire accepter comme une actrice sérieuse, où elle n’était pas encore la captivante Becky Sharp de Vanity Fair ou l’impeccable June Carter de Walk the Line. Dans l’Importance d’être Constant, sa spontanéité et son jeu envoûtent : il semblait évident qu’elle serait promise à être cette grande actrice dont le talent n’est plus remis en question aujourd’hui. Evidemment, puisque le scénario d’origine est signé Oscar Wilde, on retrouve le ton cynique qu’il se plaisait à employer pour dénoncer, par le rire et l’autodérision, la société dans laquelle il vivait : sans s’accorder un temps mort, les répliques acérées et faussement légères s’enchaînent pour notre plus grand plaisir. Avec son excellent casting, ce pamphlet contre une époque où il faut tout savoir sur chacun pour juger de son importance et toujours cette apologie du mensonge – bunburiser, comme dirait Algy –, cette critique douce-amère de la société bourgeoise anglaise est un régal. Une merveille acidulée, à savourer à l’heure du thé avec des muffins et ces fameux canapés au concombre… So British, my dear !


 

🎥 Dorian Gray ⭐ avec Colin Firth, Ben Barnes, Rebecca Hall 🗓 Sortie : 2009

S’attaquer aux chefs-d’œuvre d’Oscar Wilde n’est jamais facile. Pourtant Oliver Parker l’a fait. Et avant de s’attaquer à la nouvelle la plus connue de Wilde, il avait déjà connu quelques belles réussites : Un mari idéal (en 1999) et L’importance d’être constant (en 2002). Oscar Wilde n’aurait donc pu rêver mieux pour adapter son classique gothique. Evidemment, l’histoire subie quelques modifications. Dorian Gray doit répondre aux critères de beauté de notre époque : exit donc le blond aux joues roses du livre ! Dorian est désormais un brun ténébreux, aux grands yeux sombres et au charme typiquement anglais. Pour répondre à cette description, Parker choisit Ben Barnes. Un choix qui, au début, n’est pas sans surprendre. Certes, ce jeune Londonien s’était illustré avec talent dans le film indépendant Bigga than Ben, où sa prestation de Cobakka avait été saluée par la critique… Mais il était avant tout connu du grand public pour son rôle (un peu trop lisse) de Caspian dans les Chroniques de Narnia II. Dans ces conditions, on pouvait avoir des doutes sur son interprétation. Ben Barnes signe pourtant ici sa meilleure prestation : il incarne Dorian Gray, tout d’abord timide et candide, puis exalté et immoral, enfin, dévoué et brisé par le pacte qu’il a conclu avec le Diable. Le second choix judicieux repose sûrement sur Colin Firth : son Henry Wotton, cynique et charismatique, est irréprochable ! Difficile d’imaginer désormais quelqu’un d’autre dans les traits du dandy manipulateur. Enfin, la grande nouveauté du film est féminine : Emily Wotton. Ce nom ne vous dit rien ? Normal : elle n’apparait pas dans le roman d’origine ! Alors que Dorian ne connait qu’une grande passion dans le livre avec l’actrice Sybil Vane (Rachel Hurd-Wood, charmante mais effacée) cette relation est ici reléguée au second plan par sa liaison avec la fille d’Henry et Victoria Wotton. Emily est ici une femme de caractère, inscrite au mouvement des Suffragettes, qui donne bien des difficultés à son père ! Indépendante et courageuse, avec un côté assez masculin, elle s’intéresse à Dorian et ce dernier ne tarde pas à s’éprendre d’elle. Elle scellera d’ailleurs sa fin. Elle est ici campée par la géniale Rebecca Hall. N’en déplaise aux puristes d’Oscar Wilde, ce changement est le bienvenu : car, face à des personnages masculins aussi forts que Dorian ou Henry Wotton, il fallait une femme au tempérament volcanique, rôle auquel Sybil ne pouvait prétendre. Les sous-entendus homosexuels concernant les conquêtes amoureuses de Dorian sont ici clairement explicites, de même que sa relation avec Basil Hallward. L’enfance de Dorian est ici bien plus malheureuse que dans le livre, des souvenirs l’assaillent continuellement sous forme de flash-backs où sa souffrance et sa peur sont perceptibles : élevé par son grand-père, il subit les coups et les insultes de ce dernier. Au final, ces changements ne choquent pas, au contraire, ils s’inscrivent dans notre génération, ce qui permet de donner un souffle nouveau au chef-d’œuvre de Wilde. La seule chose que l’on peut regretter demeure la scène finale avec le portrait : cette avalanche d’effets spéciaux criards fait l’effet d’une douche froide ! Sans cela, le film est une vraie merveille, à découvrir d’urgence. Oliver Parker s’en tire une fois de plus avec brio !

 

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